Première

TOUT SIMPLEMENT NOIR

Une comédie bordélique dans laquelle la mise en abyme ne cache jamais le vrai sujet : la présence des Noirs dans le cinéma français.

- PIERRE LUNN

Jean-Pascal Zadi est un drôle de type. « Rappeur raté » (c’est lui qui le dit), réalisateu­r de docs et de programmes courts pour Canal+, c’est un sale gosse qui joue le rôle du sniper. Tout simplement noir est son premier long, une comédie qui carbure au clin d’oeil, au second degré et à l’autodérisi­on pour tenter, malgré tout, de parler d’un sujet casse-gueule : « l’invisibili­sation » des Noirs dans l’industrie ciné et la société française. Caméra à l’épaule, style mockumenta­ire, le film raconte la vadrouille de deux losers (Zadi et le comique Fary dans leur propre rôle, ou presque) qui cherchent à organiser une marche des fiertés noires. Les deux compères tentent de la médiatiser en rameutant toutes les stars noires du cinéma français (« Ça va aller vite, elles sont pas nombreuses. »). Résultat ? Un beau bordel à l’écran qui godille entre humour méta et interrogat­ions sur le communauta­risme. C’est brouillon, le casting est hétéroclit­e (JoeyStarr, Claudia Tagbo, Jonathan Cohen, Kareen Guiock...), mais les scènes sont hilarantes et l’effet d’empilage bidonne. L’abattage de Zadi, qui trimbale son gentil complexe de supériorit­é l’amenant, entre quiproquos et absurdités, à rester impavide devant toutes les humiliatio­ns qu’il subit ou fait subir à son entourage, est l’arme fatale du film. On regrettera simplement que la blague, faute de souffle et de structure, finisse par se mordre la queue. Mais au moment où la diversité semble être devenue un enjeu majeur de la réflexion sur le cinéma hexagonal, ce film libère la parole de manière décomplexé­e.

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Jean-Pascal Zadi

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