Des films QUI N’EXISTENT PAS
L’oeuvre de Mohammad Rasoulof (huit films dont un documentaire) n’est pas facilement visible : la preuve avec ses quatre films majeurs, balancés entre les festivals internationaux et l’Iran.
AUREVOIR 2011
Une avocate essaie une double mission impossible : avorter sans l’autorisation de son mari et quitter l’Iran pour de bon. Pour Au revoir, Rasoulof soumet à la censure un scénario édulcoré en éliminant les scènes qui pourraient poser problème et en ne gardant que les décors et les personnages. Le réalisateur, pourtant interdit de sortie de territoire, est autorisé à venir à Cannes présenter son film, sélectionné in extremis aux côtés d’un long de Jafar Panahi – avec qui Rasoulof s’était fait arrêter l’année précédente – intitulé Ceci n’est pas un film. Tout un symbole.
Au revoir, sorti en France en octobre 2005, est invisible en DVD.
LESMANUSCRITSNEBRÛLENTPAS 2013
Tirant son titre d’une citation du Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov (réjouissante satire fantastique de l’URSS des années 30 revisitant le mythe de Faust), le film raconte l’histoire de deux agents chargés de tuer un auteur iranien dissident et de détruire son oeuvre. Inédit dans les salles françaises, le film est disponible en DVD Zone 2 chez nos voisins anglais. Le boîtier, qui ne mentionne que le nom du réalisateur, comporte cette indication : « À cause de la censure en Iran, et pour protéger le bien-être de l’équipe et du casting, ceux-ci ont renoncé à être cités au générique. »
UNHOMMEINTÈGRE 2017
Un éleveur de poissons tente de résister face à une compagnie privée qui veut le forcer à vendre son terrain. Film noir terrassant qui évoque les classiques ruraux hollywoodiens, Un homme intègre a été projeté à Cannes – Rasoulof est même parvenu à faire le déplacement sur la Croisette – et récompensé à Un Certain Regard. Le film est disponible en France dans un beau Blu-ray qui souligne l’ambition visuelle du cinéaste.
LEDIABLEN’EXISTEPAS 2020
Tourné comme quatre courts métrages distincts avec quatre assistants-réalisateurs pour mieux déjouer la vigilance de la censure, Le Diable n’existe pas a des allures de film-somme concentrant les ambitions de cinéma de Rasoulof : le romanesque (le chapitrage du film), la rigueur visuelle, l’ambition narrative (chaque chapitre est un vrai petit thriller lorgnant parfois vers le film d’action).