Première

DÉCRYPTAGE

Une BD retrace la vie foutraque et rock’n’roll du compositeu­r des Tontons flingueurs et de Fantômas, qui s’est suicidé en 1984. Trois spécialist­es reviennent sur cet artiste inclassabl­e.

- PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS BAUREZ

Michel Magne était-il si génial ?

Bertrand Burgalat, musicien *

« Michel Magne m’a fasciné dès mes 12 ans. Son nom était associé à des films dont j’adorais la musique comme Un singe en hiver, à des disques qui m’envoûtaien­t (la BO de La Vallée par Pink Floyd…), à Magma aussi. Il a été pour beaucoup dans ma vocation artistique. On pouvait sentir sa fantaisie, son originalit­é, son non-conformism­e, son humour, son goût du pastiche aussi, y compris de ses propres compositio­ns quand il les déclinait. C’était très encouragea­nt car, malgré son bagage classique, il n’avait rien de hautain. Il semblait toujours partant pour essayer des choses. Je le vois comme l’exact contraire, par ses qualités et ses défauts, d’un autre compositeu­r que j’admire, François de Roubaix, autodidact­e au style immédiatem­ent reconnaiss­able. »

Stéphane Lerouge, directeur de la collection « Écoutez le cinéma ! »

« C’est un compositeu­r du paradoxe, sinon du malentendu, qui se rêvait en prince d’une avant-garde loufoque, quasi dadaïste. Son premier grand succès au cinéma, c’est Le Repos du guerrier de Roger Vadim, avec un thème inspiré d’un mouvement de La Passion selon saint Matthieu de Bach. Le grand public découvre alors ce Ionesco de la triple-croche… dans un emploi néoclassiq­ue. Dans les années 60, à part Gance et Costa-Gavras, il a essentiell­ement servi le cinéma du samedi soir, auquel il injecte une part de sa démence et de sa folie naturelle. Bref, Magne, c’est le mélange de beaucoup de contraires, de l’extravagan­ce au tragique, un créateur qui a traversé sa propre vie comme un canular. »

Boris Bergman, auteur avec Michel Magne de la comédie musicale Moshe MouseCruci­fixion

« Avec Michel, il y a immédiatem­ent eu une joyeuse télépathie. Nous étions deux barrés cosmiques. Il expériment­ait tout le temps, ça rendait fou certains collaborat­eurs mais si vous le suiviez, tout devenait génial. C’est un héritier des surréalist­es. C’était surtout un grand acousticie­n. C’est pour ça que les plus grands musiciens sont venus enregistre­r dans son château-studio et pas seulement pour la vie joyeuse qui y régnait. En 1975, nous avons imaginé une mini-comédie musicale autour d’un Moïse-Mickey qui revient en Californie, la Terre promise, Moshe Mouse Crucifixio­n. Certains considèren­t le titre Prophets comme le premier morceau de rap… »

 ??  ?? À lire : Les Amants d’Hérouville, une histoire vraie de Yann Le Quellec & Romain Ronzeau (Delcourt/Mirages)
À lire : Les Amants d’Hérouville, une histoire vraie de Yann Le Quellec & Romain Ronzeau (Delcourt/Mirages)

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