Première

MON LÉGIONNAIR­E

Comment appréhende­r le retour mais aussi le départ d’un soldat ? Rachel Lang dessine avec finesse l’épreuve des familles de légionnair­es.

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Ici et ailleurs. Ici c’est aussi un peu ailleurs. Et les montagnes corses finissent par se confondre avec l’immensité du Sahara. Le paysage devient mental et personnifi­e magistrale­ment le récit de ce deuxième long métrage de Rachel Lang (Baden, Baden). À l’arrière, il y a des familles qui vivent dans l’attente du retour du soldat parti au combat dans un Sahel sous tension. La légion étrangère, incarnatio­n de la droiture militaire, propose plus que tout autre une logique de la ligne franche. Rachel Lang va toutefois montrer la porosité des choses et surtout cette altérité que l’armée ne voudrait surtout pas voir. Comment construire un foyer quand l’un de ses membres est un corps trop absent ? Mon légionnair­e montre avec beaucoup de délicatess­e, de grâce et d’acuité, ce va-et-vient constant entre la sphère intime à préserver mais dont on sent bien qu’elle se fissure lentement, et le champ de bataille où les affects réprimés peuvent se transforme­r en tension sourde. Au milieu du gué, il n’y a pas de place, pas d’images. C’est l’angle mort. Que l’ici et l’ailleurs. L’horizon est immuable. C’est peut-être ça qui donne ce sentiment oppressant d’être toujours à la merci de l’autre. Mon légionnair­e est aussi un récit d’initiation, où comment les plus jeunes, déboussolé­s, tentent de prendre appui sur les plus expériment­és et, parfois, les plus éprouvés. Louis Garrel, d’un calme superbemen­t olympien, est la tour de contrôle du film. Il en est aussi la géographie, sur les traits de son visage grave, se dessine, en effet, un territoire inatteigna­ble.

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Camille Cottin et Louis Garrel

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