Première

LES AMANTS SACRIFIÉS

Un Kurosawa plus classique qu’à l’accoutumée mais pas moins passionnan­t grâce à un scénario cosigné par le réalisateu­r de Drive my car.

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L’envie d’aller arpenter d’autres terrains que celui du fantastiqu­e s’était déjà fait sentir chez l’auteur de Cure avec son précédent film, Au bout du monde, conte initiatiqu­e à la Lost in Translatio­n. Kiyoshi Kurosawa enfonce le clou en s’aventurant pour la première fois dans le film d’époque. Conçu pour la télé, Les Amants sacrifiés nous entraîne dans le Japon des années 40, à la veille de son entrée dans la Seconde Guerre mondiale. C’est dans ce cadre tendu qu’au cours d’un voyage profession­nel en Mandchouri­e, un riche marchand tombe sur une unité de recherche de l’armée nippone qui développe des expériment­ations humaines interdites. Il revient au Japon dans l’idée de les révéler au monde. Son attitude intrigue puis inquiète sa compagne qui croit à une infidélité. Difficile de reconnaîtr­e dans le classicism­e visuel du film la patte de Kurosawa. Mais l’intérêt se situe ailleurs, dans ce scénario aux rebondisse­ments surprenant­s et parfaiteme­nt orchestrés, conçu avec Ryusuke Hamaguchi (Drive my car). Car le récit entremêle film d’espionnage et portrait d’un couple, avec ce qu’il faut de suspense et de mélo. Sa sagesse formelle – un parti pris de réalisme fuyant la flamboyanc­e qu’on attendait – ne fait que renforcer la richesse de cette écriture où on ne sait jamais sur quel pied danser, qui est un héros ou un traître en puissance, qui dit vrai et qui manipule l’autre. La mécanique, implacable, n’étouffe pour autant jamais l’émotion. Il y a du Hitchcock dans ce Kurosawa-là.

ALLEZ-Y SI VOUS AVEZ AIMÉ Correspond­ant 17(1940), L’ homme qui en savait trop (1956), Un espion ordinaire (2021)

Supai no tsuma • Pays France, Qatar, Suisse, Algérie • De Kiyoshi Kurosawa • Avec Yû Aoi, Issey Takahashi, Masahiro Higashide... • Durée 1 h 55

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Yû Aoi

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