Tanaka, Take 2 !
Stupéfaction : la plus grande actrice du cinéma japonais, muse d’Ozu, Mizoguchi et Naruse, était aussi une immense réalisatrice. Six longs métrages méconnus viennent nous raconter le génie de Kinuyo Tanaka.
On connaissait son visage et son nom. On la savait actrice, pas cinéaste. Kinuyo Tanaka (1909-1977), (re)débarque aujourd’hui. Et ce n’est pas sa beauté tragique immortalisée par les grands noms du cinéma nippon qui ressurgit ici, mais ses images à elle, celles qu’elle a façonnées en six longs métrages réalisés entre 1953 (Lettre d’amour) et 1962 (Mademoiselle Ogin) et qui débarquent aujourd’hui en salles. Nous voilà donc face à Tanaka cinéaste, deuxième réalisatrice de l’histoire du cinéma japonais et non plus Tanaka superstar du muet puis du parlant.
Que vaut cette oeuvre cinématographique au-delà des circonstances, forcément machistes, qui l’ont vue naître ? Plongés dans un bain néoréaliste avec les petites rues des grandes villes comme théâtres de l’intime, ses premiers films montrent une jeunesse middle class qui s’affranchit doucement des traditions. Les héros lisent James Joyce, écoutent Chopin, trouvent le théâtre japonais rasoir et tentent de s’aimer. Les figures féminines sont au centre du jeu. La cinéaste va délaisser peu à peu le noir et blanc et la vitalité du contemporain pour des drames plus épiques en couleur. Ainsi, Mademoiselle Ogin, situé dans le Japon du XVIe siècle, est un mélo flamboyant. « Je veux mourir par amour… », annonce l’héroïne en bout de course. Ce sacrifice n’est pas à prendre pour un geste de soumission mais bien un acte de liberté pure car « en ce monde, il existe un amour immense que seule la mort peut procurer… Ne me suivez pas ». Ce sera le mot de la fin pour Tanaka réalisatrice. L’actrice, elle, poursuivra sa route aux étoiles.
Six longs métrages de Kinuyo Tanaka • En salles à partir du 16 février • Distributeur Carlotta
Le Dictionnaire du cinéma japonais en 101 cinéastes • Éditeur Carlotta