Première

ENTRE DEUX REEVES

S’il a longtemps fait carrière dans l’ombre de son copain J. J. Abrams, Matt Reeves s’est émancipé avec La Planète des singes. Et s’apprête à confirmer avec The Batman.

- PAR FRANÇOIS LÉGER

Quand Cloverfiel­d sort en 2008, pratiqueme­nt personne ne parle de son réalisateu­r. Tous les yeux sont braqués sur le producteur J. J. Abrams, golden-boy derrière Alias et Lost, qui s’est fait un nom de cinéaste deux ans auparavant avec son Mission : Impossible III. Un peu dépossédé de son film, Matt Reeves laisse couler : ce qui aurait dû être son explosion ne sera finalement qu’une étape de plus en attendant la reconnaiss­ance. Comment en vouloir à son pote, qu’il connaît depuis ses 13 ans, d’incarner le visage souriant d’une culture geek dont Hollywood commence à comprendre la valeur financière ? Dans l’ombre d’Abrams depuis qu’ils ont cocréé la série Felicity, Reeves se sera essayé en solo à la comédie romantique (son très vite oublié Porteur de cercueil, sélectionn­é en 1997 à Un certain regard), au scénario (le grand écart entre Piège à grande vitesse et The Yards de James Gray) et à la réalisatio­n de séries TV avortées (Miracles, Conviction…). Mais après un remake mollasson de Morse du Suédois Tomas Alfredson (Let me in, 2010), Matt Reeves semblait carrément au bout du rouleau. N’était-il qu’un faiseur appliqué comme mille autres à Burbank ? Son salut viendra de Warner Bros., qui croit suffisamme­nt en lui pour lui confier la suite de

La Planète des singes. Surprise. Avec L’Affronteme­nt et Suprématie, il se révèle capable de jongler entre conflits

Légende à grande échelle et drames intimistes, pop-corn movie et métaphore politique bien troussée. Le nom « Reeves » devient une marque hollywoodi­enne et c’est à nouveau vers lui que le studio se tourne pour relancer une énième fois son joyau, le Dark Knight. Légende « J’ai dit à Warner Bros. qu’il fallait me laisser la liberté de faire le film Batman définitif, nous assuret-il en interview sur Zoom. Impossible de se lancer à moitié dans un Batman, impossible de le faire en dilettante ! Il faut viser les étoiles. Ça ne veut pas dire qu’on y arrivera, mais si on part sans ambition, ça sera forcément une catastroph­e. Je n’aurais pas toléré de me louper sur le personnage de comic book que j’aime le plus. » On fixe sa grosse moustache bien peignée qui le fait ressembler comme deux gouttes d’eau au commissair­e Gordon. Aucun poil ne tressaille, il doit donc dire vrai.

Newspapers in French

Newspapers from France