Première

UN BATMAN VRAIMENT TOURMENTÉ

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On l’observe seul dans un manoir trop grand pour lui, on capte sa silhouette accablée qui se détache dans l’obscurité d’un Gotham désolé, on filme encore et encore la mort de ses parents dans une ruelle sordide : au cinéma, Bruce Wayne n’est pas tout à fait un archétype qu’on redessine, plutôt un cliché qu’on ressasse. Depuis l’ère Burton, la solitude et les névroses du personnage débouchent ad lib sur les mêmes vignettes gothico-mélancoliq­ues, soulignant les mêmes crises d’inspiratio­n pour leurs auteurs. Les petites fantaisies personnell­es (la voix bestiale du Batman nolanien, la sexytude agressive des versions Schumacher) feront au mieux pouffer et inciteront de fait les suiveurs à y aller mollo sur la déconstruc­tion du Dark Knight. On s’en tient donc aux chromos standards qui ont pourtant été transcendé­s le temps d’un long métrage d’animation absolument splendide, Batman contre le fantôme masquéqué – imaginé par les auteurs de la série télé des 90s. Pour une fois, on élaborait une théorie poignante sur les tourments de Bruce Wayne et de son alter ego : ils étaient avant tout des romantique­s en puissance, des amoureux éconduits, des sensibles. Et si les traumas, les vilains et le bitume de Gotham s’étaient chargés de broyer leur petit coeur sensible, le retour (impossible) vers l’innocence était pour eux le seul horizon envisageab­le et l’origine de tous leurs tourments. Cette quête émotionnel­le changeait la donne et renouvelai­t soudaineme­nt toute l’imagerie creepy imposée par Tim Burton. néanmoins La propositio­nrestera lettre morte. Jusqu’à The Batman ?

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