Première

BabiYar. Context de Sergei Loznitsa

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Stupeur sur les hashtags #cinéma et #histoire. Un soir de mars, en plein conflit ukrainien, on apprend que le mémorial de Babi Yar aurait été touché par des missiles russes – on découvrira quelques jours plus tard que le site avait été miraculeus­ement épargné. Babi Yar, c’est le nom d’un ravin où, en septembre 1941, les nazis tuèrent par balles 33 000 juifs de la région. Très vite les SS ont tenté d’effacer les traces de leur forfait, puis des années plus tard, ce sont les Soviétique­s qui ont bâillonné la mémoire locale en comblant le ravin de déchets industriel­s. Pas de commémorat­ion possible à Babi Yar, semblaient dire les gouverneme­nts successifs. Pour contrer ce travail d’enfouissem­ent, l’Ukrainien Sergei Loznitsa a imaginé un docu stupéfiant de brutalité, Babi Yar. Context.

Présenté au Festival de Cannes 2021, en séance spéciale, le film compile des images d’archives et ausculte le plus grand massacre par balles de la Shoah, tendant un miroir à ceux qui continuent de confondre histoire et roman national. Au-delà de l’horreur, ce que le film expose, c’est la manière dont le régime soviétique a trusté la mémoire collective des Ukrainiens. « Je crois que ce film est nécessaire pour faire passer Babi Yar d’un lieu d’oubli à un lieu de mémoire. » Suprême ironie : alors que les bombes pleuvent sur Kyïv (Kiev), alors qu’on a failli rayer le mémorial de la carte, ce doc tétanisant est toujours inédit en France, aucun distribute­ur n’ayant pour l’instant prévu de le diffuser. Comme si l’histoire était condamnée à balbutier.

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