Jared Leto Je ne serai jamais un acteur ennuyeux
Les maquillages cubistes et le surjeu rococo sont devenus sa trademark. Jared Leto ose tout, même le superhéroïsme bizarroïde. Comme ce mois-ci dans Morbius, où il devient un vampire en cherchant un remède à sa maladie sanguine.
PREMIÈRE : Jared, qu’est-ce qui vous a attiré dans le personnage de Morbius ?
JARED LETO : C’était un rôle parfait pour moi parce que je joue un type à l’article de la mort, qui retrouve ensuite la santé. Il devient alors super fort, avant de se transformer en monstre. Wow : ça en fait des trucs à jouer ! J’aime bien l’idée de pouvoir insuffler ça dans un pop-corn movie. Je n’ai aucun problème avec les films commerciaux tant qu’ils sont bien faits. Ça peut même être une expérience transformatrice pour le spectateur. J’ai grandi à une époque où tu pouvais vivre en ne jouant que dans des films indépendants. Ça, c’est fini. mais j’essaie toujours d’aller plus loin que ce qu’on me propose. Ce qui m’intéresse, c’est la création d’une vie à l’écran. Comme de la sculpture, mais avec mon corps et mon esprit.
Votre vision du jeu pourrait se résumer à du method
acting un peu extrême, avec pas mal d’exagération, d’extravagance, voire de grotesque…
Je n’ai pas peur d’être extravagant, c’est la bonne formule. Mais c’est parce que je vois de l’extravagance partout dans la vraie vie. Je pourrais très bien croiser quelqu’un avec les cheveux en feu dans les rues de New York, ça ne me semblerait pas totalement surréaliste. Par contre, mettez ça dans un film et les gens diront : « N’importe quoi, ça n’arriverait jamais dans la réalité. »
Euh, peu de chance que ça arrive quand même, non ?
Je vous l’accorde, mais vous comprenez l’idée…
Oui, oui… Pratiquement plus personne n’ose ce que vous faites à Hollywood. C’est aussi une façon de reprendre le pouvoir sur la création, de vous rebeller ?
Je n’ai pas vraiment de grief contre Hollywood. C’est lié à quelque chose de plus intime, à une vision du métier. Une fois, Quentin Tarantino a dit à l’un de ses acteurs qui s’inquiétait d’être « too much » : « Dans mes films, tu ne peux pas être too much. » Il a raison. Je n’en peux plus de voir des acteurs prendre la pose près de la caméra et murmurer pendant une heure trente. Je m’en fous. J’aime explorer les extrêmes du comportement humain. Parfois, ça veut dire être parfaitement silencieux, et parfois en faire des caisses. L’intime et le hors-norme. Ça, c’est excitant.
Et la conséquence, c’est que vous êtes un acteur qui polarise…
Je n’en ai rien à foutre pour être honnête. Je peux juste vous promettre un truc : je ne serai jamais ennuyeux. À ce moment de ma vie et de ma carrière, j’essaie de casser le moule. Sinon, je ne vois pas à quoi ça sert. Je m’en tape d’avoir le plus beau sourire de Hollywood.
À vos yeux, les rôles sont plus importants que les films ?
Je dirais que oui. Je suis très concentré quand je fais ce genre de choses. Je suis dans ma bulle et c’est un processus extrêmement gratifiant. Je me retrouve dans les Peter Sellers, les Daniel Day-Lewis, les Jack Nicholson… Des acteurs qui s’immergent, qui disparaissent dans leurs rôles. Rien à faire de jouer les types lambda. Il y a des acteurs très, très subtils que j’adore en tant que spectateur, mais ce n’est pas ce qui m’excite, désolé.
MORBIUS
De Daniel Espinosa • Avec Jared Leto, Matt Smith, Adria Arjona...
Sortie 30 mars