L’Extravagant Mister Deeds
En 1936, profitant des sorties conjointes de Furie de Fritz Lang et de L’Extravagant Mister Deeds de Frank Capra, deux films au profil opposé mais centrés autour d’un personnage en proie à une foule déchaînée, l’écrivain Graham Greene ose un parallèle : « Le happy end de Lang lui a été imposé, et on n’y croit pas ; celui de Capra est naturel et librement choisi. Capra croit en la possibilité du bonheur. » Tout l’art dramatique de Capra est ici résumé. Mais qu’est-ce qui fait que chez la majorité des cinéastes une telle pureté passe pour de la naïveté alors qu’elle confine chez lui au sublime ? Ce Deeds, un de ses plus beaux films, apporte un élément de réponse : la dualité de la mise en scène. Chez Capra, un mouvement d’appareil, une lumière crée une dialectique. Dès son arrivée à New York, Longfellow Deeds (magnifique Gary Cooper en Don Quichotte généreux), gentil garçon qu’un héritage imprévu propulse dans le grand monde, se retrouve sanctifié par une contreplongée. Par son emphase, ce plan fugace semble contredire la simplicité du bonhomme. Le cadre (aidé du charme décalé de Cooper) va devoir se rééquilibrer offrant une vision du monde plus directe – donc plus juste –, pour que le personnage triomphe du cynisme. Du grand art. La présente édition propose une copie 4K. Elle est accompagnée d’un texte de Frédéric Albert Lévy et d’une analyse éclairante de Christian Viviani. Indispensable.
u
De Frank Capra • Avec Gary Cooper, Jean Arthur, George Bancroft… • Éditeur Wild Side • Bonus ★★★★ • En Blu-Ray et DVD