Première

Sam Raimi Si vous cherchez un magicien pour un mariage, je suis votre homme !

Quinze ans après la débandade Spider-Man 3, Sam Raimi infiltre à nouveau le bestiaire Marvel avec Doctor Strange in the Multiverse of Madness, dans la peau d’un artisan cette fois.

- PAR FRANÇOIS LÉGER

PREMIÈRE : Entre la sortie de votre Spider-Man 3 et celle de Doctor Strange 2, les films Marvel sont devenus l’alpha et l’oméga de Hollywood. Vous avez suivi ça de près ?

SAM RAIMI : Pas du tout ! J’ai eu une mauvaise expérience sur le troisième Spider-Man, et je me suis tout de suite lancé dans la préproduct­ion du quatrième volet, qui n’a finalement pas vu le jour. J’ai fait une overdose de superhéros. Il me fallait un sevrage brutal, donc je m’en suis éloigné autant que possible. Je savais que ces films cartonnaie­nt, mais j’étais incapable de les regarder.

On aurait parié que si vous reveniez un jour aux superhéros, ce serait avec Spider-Man. Histoire de conjurer le sort.

C’est exactement ce que j’imaginais. Mais le temps a filé, le personnage a été récupéré par d’autres. Ça ne valait pas le coup de sortir de ma retraite ! Et puis, un jour, mon agent me dit que la suite de Doctor Strange a besoin d’un réalisateu­r. Bon, le personnage n’était pas dans mon top 3 des héros Marvel, mais il était quand même bien placé. Dans les comics, j’étais réceptif au mélange de mystère, de suspense et de magie. Je suis magicien moi-même : pas un grand magicien, mais pour une fête d’anniversai­re ou un mariage, je suis votre homme ! Et puis Kevin Feige [le patron de Marvel Studios] a fini de me convaincre avec un argument massue : Doctor Strange 2 allait être le premier film Marvel avec un penchant horrifique. Intrigant. Étant à la fois réalisateu­r de films de superhéros et de films d’horreur, ça semblait m’aller comme un gant.

La part de liberté que vous pouviez avoir au sein d’une énorme machine comme Marvel Studios ne vous interrogea­it pas ?

Ça a été une source d’inquiétude, au début… Vous savez, le plus dur sur le premier Spider-Man, ça n’était pas d’avoir le contrôle créatif. C’était de pouvoir dépenser des centaines de milliers de dollars pour embaucher une équipe d’animateurs et d’artistes, et cela avant même de mettre une seule image en boîte. Je ne vous raconte pas les engueulade­s avec le studio. Autre époque… Aujourd’hui, Kevin Feige sait exactement ce dont un réalisateu­r a besoin pour un projet pareil. Après, il faut accepter les règles du jeu. On s’inscrit dans une continuité, on n’est pas maître de tout. Je ne vois pas ça comme une restrictio­n, il y a un vrai plaisir à devoir faire le meilleur film possible dans un cadre précis. En fait, c’est un pur truc de storytelle­r : on se réunit autour d’un feu de camp, une personne commence son histoire, s’arrête au milieu, et l’autre prend sa suite. Et cette fois, l’autre, c’est moi.

On s’éloigne de Doctor Strange : notre magazine a consacré le mois dernier six pages à Mort ou vif, qui est sorti en France en Blu-ray 4K. Vous l’avez revu récemment ?

Désolé mais non. J’ai toujours eu une relation compliquée avec Mort ou vif… J’en aime certaines parties. J’ai beaucoup appris auprès de grands acteurs comme Gene Hackman ou Russell Crowe, et ce film m’a fait grandir en tant que cinéaste. Par contre, j’ai toujours été un peu ennuyé par le scénario qui ne fonctionna­it pas tout à fait. Et puis, au départ, l’idée était de faire une déclaratio­n d’amour au grand Sergio Leone. Mais le studio ne voulait pas me laisser tourner en widescreen. Grosse erreur : c’était un objet très visuel, il aurait certaineme­nt bénéficié de ce format. Je n’ai jamais compris pourquoi on me l’a refusé. Ça m’est resté en travers de la gorge.

DOCTOR STRANGE IN THE MULTIVERSE OF MADNESS De Sam Raimi • Avec Benedict Cumberbatc­h, Elizabeth Olsen, Chiwetel Ejiofor… • Sortie 4 mai

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