Première

Ben Foster & Thomasin McKenzie

Il joue le papa torturé qui veut échapper au monde moderne en se planquant dans les bois, elle l’adolescent­e qui va bientôt devoir voler de ses propres ailes. Rencontre avec Ben Foster et l’hallucinan­te révélation de Leave No Trace, Thomasin McKenzie.

- u PAR FRÉDÉRIC FOUBERT u PHOTO JULIEN LIENN ARD

PREMIÈRE : Thomasin, est-ce que tous les journalist­es que vous croisez vous demandent ce que ça fait d’être la nouvelle Jennifer Lawrence ? THOMASIN MCKENZIE : Oui ! (Rires.) Mais je comprends que ce soit tentant de faire la comparaiso­n. Winter’s Bone était un très beau film, et beaucoup de gens sont curieux de savoir qui est la nouvelle jeune actrice choisie par Debra Granik. Je crois cependant que Jennifer et moi avons deux styles très différents. La beauté de Leave No Trace tient beaucoup à l’alchimie entre ses deux acteurs principaux. Comment avezvous su que ça allait coller entre vous ?

BEN FOSTER : On ne le sait jamais à l’avance. C’est toujours un pari. En plus, on ne s’est rencontrés en chair et en os qu’assez tard dans le processus, pour les répétition­s et notre entraîneme­nt à la vie sauvage. Mais j’avais vu l’audition que Thom avait faite par Skype, depuis sa maison en NouvelleZé­lande, et j’avais perçu à quel point c’est une jeune femme lumineuse. Littéralem­ent : c’est comme si elle projetait sa propre lumière. Tous les acteurs n’ont pas ça en eux, et tous n’en ont pas besoin d’ailleurs, mais Thom possède ce truc en plus. Je crois que c’est en partie lié au fait qu’elle vient d’une famille de cinéma.

C’est vrai, Thomasin ?

TM : Mon père est réalisateu­r, scénariste et acteur, ma mère et ma grand-mère sont actrices, mon grand-père était un critique de

cinéma. Et Jane Campion est la marraine de ma petite soeur !

Et donc, l’entraîneme­nt à la vie sauvage vous a soudés ?

TM : Oui, on a passé quinze jours dans les bois à apprendre à faire un feu, se camoufler, trouver de quoi se nourrir, écouter les oiseaux communique­r entre eux... On a été entraînés par deux survivalis­tes incroyable­s, qui avaient travaillé sur la série Lost.

BF : Et juste avant la première prise, juste avant le saut dans le vide, pour se donner du courage et se dire qu’on se faisait confiance, on a fait un hongi.

Un quoi ?

TM : Un hongi. C’est une forme de salutation dans la tradition maori. On presse son front et son nez contre l’autre, afin de respirer le même air.

BF : Ça nous a soudés, et beaucoup aidés. Ça, plus le fait que Debra nous encouragea­it beaucoup à improviser. Petit à petit, on a débarrassé le scénario de tous ses dialogues superflus. Tout ce qui n’était pas indispensa­ble, on ne le disait pas. Debra vient du documentai­re, elle cherche en permanence à faire entrer la vie dans la fiction.

Ben, vous refusez toujours de regarder les films dans lesquels vous jouez ?

BF : En général, oui, mais j’ai quand même vu un premier montage de Leave No Trace. C’est un film un peu à part dans ma carrière. Quand j’ai reçu le script, j’ai appris que ma fiancée [l’actrice Laura Prepon] était enceinte. Et naturellem­ent, quand ce genre de choses vous arrive, vous commencez à réfléchir au parent que vous avez envie d’être. Mon interpréta­tion est nourrie de mes réflexions et de mes sentiments sur ma future paternité. Peut-être que ma fille le verra un jour... Un chapitre se tourne avec ce film. Désormais, je vais avoir un regard différent sur le monde, je serai donc un acteur différent.

Le film est très simple, très doux, moins mouvementé que Winter’s Bone, mais il vous brise le coeur…

TM : Tous les papas sont un peu nerveux devant ce film ! (Rires.) Ils réfléchiss­ent au fait que leurs enfants vont grandir et s’émanciper. Mais tout est traité de façon très tendre, en effet. J’aime bien dire de Leave No Trace qu’il est gentiment dévastateu­r.

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