Première

CLIMAX

Virtuosité stroboscop­ique, violence, malaise, vrilles psychédéli­ques et parano… Tourné en quinze jours, dégoupillé à Cannes façon happening, Climax se savoure comme un concert surprise où Gaspar Noé rejouerait ses plus grands hits.

- FF

C’est quoi ce film ? En début d’année, on apprenait que Gaspar Noé venait de tourner, en deux petites semaines, un film mystère, nom de code : Psyché, en compagnie d’une armada de street dancers emmenée par l’Amazone moderne Sofia Boutella. Mais de quoi s’agissait-il exactement ? Un documentai­re sur une rave party ayant mal tourné ? Un film d’horreur ? Une comédie musicale sous MDMA ? Pensé et produit sous le radar, l’ovni, rebaptisé Climax, a fini par débarquer au dernier Festival de Cannes dans l’habituel tourbillon de soufre, de danger et d’excitation quasi sexuelle qui saisit la Croisette quand Noé vient y proposer son dernier trip, décuplé cette fois-ci par la nature énigmatiqu­e du projet.

ÉTAT DE MANQUE. Mais alors, c’est quoi, Climax ? On passe justement toute la projection à se poser la question. Le film s’ouvre sur une scène de danse hallucinan­te, un plan-séquence à se décrocher la mâchoire, dont on sait en le voyant qu’il sera désormais cité dans tous les anthologie­s ou mashup du genre. Mais cette scène jouissive est un leurre, le spectateur se mettant alors à attendre un autre numéro aussi puissant et dingo. Sauf que celui-ci n’arrivera jamais... On n’est pas dans Sexy Dance. Noé, pervers, vient d’instiller en nous une sensation de manque, et, à partir d’un argument prétexte (la sangria du buffet a été coupée à l’acide), peut alors nous entraîner dans le vortex, au coeur des ténèbres, montrant l’implosion d’un groupe humain mis face à ses pires pulsions, tandis qu’autour de lui le monde s’écroule, comme dans un film de zombies de Romero. Climax part en vrilles psychédéli­ques de plus en plus horribles, de plus en plus intenses, la chronologi­e s’inverse, le générique surgit en plein milieu, des slogans tentent de mettre un peu de sens dans tout ça, la musique cogne, la panique grimpe, et on finit la tête à l’envers (littéralem­ent). C’est quoi ce film ? Peutêtre l’allégorie d’une société sombrant dans le chaos, le commentair­e social le plus acéré balancé par Noé depuis Seul contre tous. C’est surtout le best of orgasmique du styliste le plus doué de l’Hexagone. Un film dément et fier de l’être.

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Sofia Boutella (en haut au centre)

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