Première

L’AMOUR EST UNE FÊTE

Un film au souffle libre qui commence comme un thriller pour devenir la peinture d’une époque et la célébratio­n d’une joyeuse clique de pornograph­es.

- GG

Cédric Anger s’est fabriqué une belle filmo de polars verrouillé­s par un sens de la narration diabolique, de L’Avocat à La prochaine fois je viserai le coeur. L’amour est une fête se lance au début sur les mêmes rails, avec des flashs de violence et de néons qui illustrent l’aspect charnière de l’époque. On est en 1982, l’euphorie socialiste est à son comble, mais la gueule de bois va être sévère. La première partie du film ressemble à un polar à l’ancienne, un Deray 70s revu et corrigé par le David Simon de The Deuce. Deux flics (Gilles Lellouche et Guillaume Canet) infiltrent le milieu du porno pour faire tomber les chefs de la pègre locale. Mais, progressiv­ement, les héros vont prendre goût au jeu et produire leur propre film... Anger abandonne alors le thriller et passe au conte de fesses libertaire, baguenauda­nt dans cette époque d’avant l’arrivée du sida et de la vidéo (et des tournages bâclés qui en ont découlé), célébrant ce moment où le porno n’a pas encore perdu son innocence. Son film devient mobile comme la flamme à laquelle tous se brûleront ; il danse et va où il veut. Ça parle d’amour, de liberté, de cinéma amateur hardi, cet art mineur où seul comptait le cul, l’humour et un surréalism­e à la cuisse légère. Dans cette deuxième partie plus free, plus folle, plus belle aussi, L’amour est une fête devient le portrait d’un groupe d’amis pris dans la débrouille et les câbles électro. Producteur­s amoureux, cinéastes frustrés, figurants émotifs... Le porno vient de trouver sa Nuit américaine.

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Guillaume Canet

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