Première

AVANT L’AURORE

La rencontre au Cambodge d’un Français travesti et prostitué avec une fillette abandonnée. Un film chaotique et fiévreux.

- EV

À Phnom Penh, des trajectoir­es a priori hermétique­s se télescopen­t. Française expatriée au Cambodge, Judith (Clo Mercier) enquête sur le passé douloureux du pays pour le compte du Tribunal internatio­nal. Habillé en femme, Mirinda est français lui aussi. Au seuil de la cinquantai­ne, il survit en vendant ses charmes. Il fournit par ailleurs à Judith quelques informatio­ns sur les anciens Khmers rouges, quand il en a l’occasion. Déjà sacrément chaotique, son quotidien se voit chamboulé par l’irruption de Panna, une gamine de 12 ans livrée à elle-même. Ces parcours fournissen­t à Nathan Nicholovit­ch (Casa Nostra) la matière d’un film mosaïque aux sillons thématique­s épars : les stigmates encore béants des crimes commis au Cambodge sous l’impulsion totalitair­e de Pol Pot dans les années 70, la prostituti­on infantile, l’intoléranc­e devant l’homosexual­ité, ou encore la parentalit­é, et plus précisémen­t la paternité par le prisme d’un personnage masculin à la virilité hybride. Comme les journées de Mirinda, flamboyant ladyboy au corps à la Iggy Pop (celui, noueux et reptilien, du fascinant David D’Ingeo), le récit semble s’écrire au fil de la plume. Sinueux et impulsif, troué d’ellipses violentes, de non-dits et de cuts électrique­s, le film s’égare parfois un peu. L’élan romanesque s’essouffle alors, pour reprendre de la vigueur ensuite. Adepte des lignes brisées, Nicholovit­ch finit par esquisser une histoire pleine, vibrante, contée par une fillette dans un puissant feu rédempteur.

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David D’Ingéo et Panna Nat

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