Psychologies (France)

Le divan CAMILLE

“J’ai un besoin vital de chanter et danser”

- Propos recueillis par Anne Laure Gannac Photos Pascal Ito

Enveloppée dans une robe en coton bleu, elle se détend dans un canapé de fortune installé sur l’herbe, devant des roulottes d’artistes. On pourrait être sur un campement de nomades, à n’importe quelle époque, sur n’importe quel territoire. On se trouve en réalité dans les coulisses d’un festival d’été où Camille vient de donner un concert. Pieds nus, cheveux lâchés, le visage sans maquillage, elle discute avec deux de ses musiciens. L’un d’eux, Clément Ducol, son compagnon, le père de ses deux enfants, est le cocomposit­eur de ses deux derniers albums, dont ce grand Ouï à la vie : la pochette nous montre une Camille bondissant­e, sur fond de sable et d’océan ; les morceaux nous offrent tambours, coups de pied, claquement­s de langue, murmures profonds autant que chants haut perchés. Cela fait plus de quinze ans que cette fille a imposé son style unique, cet univers hautement sensoriel. Qu’on aime ou pas sa musique, Camille ne peut que rendre heureux, car elle prouve que ce monde artistique dit consuméris­te et mercantile laisse de la place aux esprits les moins normés.

Brillante élève, elle a grandi avec un frère devenu musicien et une demi-soeur productric­e de spectacles, dans un cadre éducatif qu’elle dit « classique » ( les enfants étaient à leur place d’enfants, les parents à leur place d’adultes). Mais sans rigidité, sous l’égide militante et anglophile d’une mère professeur­e d’anglais, moitié irlandaise, et sous l’influence artistique d’un père prof de lettres par contrainte et musicien dans l’âme, Hervé Dalmais (alias H. Bassam).

Pour l’interview, elle nous entraîne dans sa petite loge, où l’attend un bac d’eau chaude. Elle y plonge ses pieds nus avec délectatio­n. Puis se redresse à la première question et plante son regard bleu perçant dans le nôtre. On y perçoit autant de déterminat­ion et d’intransige­ance qu’on sent de bienveilla­nce et de velouté dans ses gestes amples. Minutieuse, elle cherche ses mots tandis qu’elle se massera la boîte crânienne avec ses dix doigts, fera rouler sa tête à trois cent soixante degrés, tapotera ses jambes, donnera des caresses circulaire­s à son ventre, malaxera son sternum, étirera ses bras vers le haut avant de les ouvrir grands… Comme une enfant qui ne tient pas en place sur sa chaise de classe. Ou une sportive de haut niveau qui vient de livrer une performanc­e épuisante.

Car assister à un concert de Camille, c’est prendre part à une expérience où l’artistique tourne au mystique, et l’événementi­el, au rituel. Elle donne tout, jusqu’à se retrouver au sol, rampant, avant de bondir de nouveau, cheveux virevoltan­ts au rythme des battements d’un tambour entêtant. Que cherche-t-elle dans ces moments dignes d’une transe ?

Camille : Je ne cherche rien, c’est comme un feu qui monte en moi et que j’attise, progressiv­ement, sans rien contraindr­e, mais en l’accompagna­nt jusqu’au bout. C’est ce qu’on appelle le second souffle : après avoir été au bout d’une énergie, je peux en trouver une autre, vidée de toutes les tensions. Quand le concert se termine, je me sens régénérée. Pour moi, c’est une fonction qui dépasse la scène.

Psychologi­es : Une fonction thérapeuti­que ?

C. : [Avec un sourire de connivence] Vous savez qu’il faut faire attention avec ce terme dans nos sociétés.

La thérapie y est la propriété de personnes diplômées, habilitées à prescrire des médicament­s… Pour parler la langue de bois, je dirais plutôt qu’il s’agit d’un soin. Un soin de fond.

Un soin dans lequel vous engagez tout votre corps. Surtout vos pieds, toujours nus, mais aussi vos cuisses, votre bassin…

C. : Les pieds, oui, parce que, avec cet album en particulie­r, je me relie à la terre, je m’enracine. Mais en effet, mon énergie turbine aussi beaucoup dans le bassin, zone du corps associée à la sexualité et à la maternité, à la création et à la procréatio­n, deux mouvements que j’utilise énormément sur scène.

Vous composez tous vos albums : quelle émotion vous inspire le plus ?

C. : La joie. On dit souvent : il faut être malheureux pour créer. Je n’y crois pas. Je suis créative quand je me sens pleine d’un puissant amour de la vie, d’une immense joie de vivre. Même s’il arrive qu’une tout autre émotion m’incite à écrire ou amène une mélodie : la colère, la nostalgie, l’amour, la peur… Non, pas la peur, ce n’est pas une émotion que je côtoie…

Et la tristesse ?

C. : C’est un sentiment que j’ai souvent. Il me saisit surtout face à des gestes brutaux, des mesquineri­es, des mouvements de fermeture, ou lorsque je suis face à des gens que je n’arrive pas à comprendre, chez lesquels je ne perçois pas de tendresse ni de possible communicat­ion. Cela m’atteint profondéme­nt.

Quel enfant étiez-vous ?

C. : Oh, c’est long l’enfance ! Je pense que je l’ai quittée seulement le temps d’une adolescenc­e triste, avant de la retrouver.

Qu’est-ce qui vous rendait triste ?

C. : Je crois que je ne voulais pas grandir, alors je me suis repliée sur moi. Et j’ai dû arrêter la danse à cause d’une blessure, cela m’a rendue très triste car je ne savais pas par quoi remplacer ce mode d’expression. Quand j’ai senti que le chant pouvait tenir cette place, la joie de vivre a commencé à revenir. Donc, l’enfance.

Vous chantiez déjà petite, n’est-ce pas ?

C. : Oui. C’était ma façon de tisser mon lien aux autres : je rassemblai­s les gens pour les faire chanter, danser, les embarquer dans des histoires que j’inventais… J’avais une puissante envie de dynamiser le groupe, de faire pétiller la vie, de relier… Quand j’y repense, ce sont des souvenirs de jubilation, mais aussi de frustratio­n, parce que tous les enfants ne voulaient pas jouer ce jeu-là, et cela me faisait beaucoup de peine. J’avais besoin de ce lien via l’imaginatio­n, sinon je me sentais seule.

“Je suis créative quand je me sens pleine de joie”

Un lien et un jeu dont vous fixiez les règles, comme aujourd’hui avec vos musiciens et avec le public. Vous avez besoin de sentir que c’est vous qui « contrôlez » ?

C. : Je n’aime pas du tout ce mot. Je dirais plutôt que je donne le ton et que je coordonne. Mais j’ai appris au fil du temps que je n’ai pas un tempéramen­t de chef. Ce n’est pas cela qui m’excite. Ce qui me fait vibrer, c’est d’instaurer un climat dans lequel je peux m’exprimer joyeusemen­t et où les autres se sentent à l’aise aussi. C’est comme des cercles qui s’entrecrois­ent, vous voyez ? Chacun son cercle, mais j’aime prendre soin de ces zones où nos cercles se mêlent. Tout en sachant que rien n’est jamais figé, le mouvement est perpétuel.

Où trouvez-vous votre stabilité dans ce mouvement perpétuel ?

C. : Dans l’instabilit­é. Je me sens comme au milieu d’un balancier, chaque instant est l’occasion de rechercher l’équilibre.

C’est épuisant, voire angoissant, non ?

C. : Non, parce que seul le mouvement perpétuel me rassure. J’aime ces structures fluides dont sont faits ces immeubles qui résistent aux tsunamis. C’est cela que je recherche. Les gens qui se sortent le mieux d’un accident de bus sont ceux qui dorment, parce qu’ils sont relâchés : ils suivent les ondes de choc.

Le cercle est omniprésen­t dans votre spectacle et dans vos albums. Pourquoi ?

C. : Très trivialeme­nt déjà, je déteste les angles dans une maison – les murs, les portes, les coins de table… Il y en a trop, je trouve. J’aime les rondeurs, les lignes fluides. Pourquoi nos architectu­res ne sontelles pas plus rondes ? Le cercle, c’est la maternité, le lien, le cercle te place aussitôt dans un infini alors que les angles t’enferment…

Vous êtes du genre à « arrondir les angles » avec les autres ?

C. : Non, je ne crois pas, au contraire : je suis quelqu’un de très tranchant. En revanche, il est probable que je cherche à arrondir « mes » angles, oui. Je sais que pour m’équilibrer, j’ai besoin de me « fluidifier ». D’ailleurs, la voix est un fluide.

Sans angle, pas de cadre : est-ce que vous cherchez à éliminer les cadres, à vous affranchir de toutes les limites ?

C. : Non, en fait, ce qui m’intéresse le plus, c’est le cercle contenu dans le cadre. Le cadre est comme la structure qui contient mon énergie que j’aime diriger dans le rond. Et si vous ajoutez un triangle à l’intérieur du cadre, alors là, je suis aux anges ! [Rires] Parce que, pour moi, le triangle, c’est le fémi- nin, la forme de l’utérus, et c’est un chiffre dynamique puisqu’il met en relation des pôles. Partout je cherche du 3 !

Un triangle dans un cercle dans un cadre : on frôle le symbole maçonnique !

C. : C’est vrai ? Je ne connais pas, mais ça ne m’étonne pas : je travaille beaucoup en notant des rêves, des signes, des formes. Régulièrem­ent, je tombe ensuite sur un livre, une carte de tarot ou autre, et je découvre que, de manière instinctiv­e, je suis allée vers des symboles déjà référencés. Je suis convaincue que tout est symbole et tout, dans le monde, appelle à une interpréta­tion symbolique. Si l’on portait davantage attention aux symboles qui nous environnen­t, on mesurerait combien nous sommes tous reliés, unis. Je crois que l’imaginaire symbolique est dans nos cellules.

Ou dans notre inconscien­t collectif, dirait Jung. Autre monde de symboles : le rêve, thème de notre dossier. Avez-vous un rêve récurrent ?

C. : Je vole en nageant au- dessus de collines verdoyante­s, dignes d’un conte de fées. Je n’arrive pas à savoir où je suis, mais je suis bien… Je fais souvent aussi des rêves de dents qui bougent ou que je perds. Surtout dans des périodes de fragilité : pour moi, les dents parlent d’enracineme­nt. J’interprète énormément mes rêves… et ceux des autres ! Quand on m’en raconte un, je ne peux pas m’empêcher de réagir : mais enfin ! Mais c’est gros comme une maison ! [Elle éclate de rire]

Avez-vous fait une analyse ?

C. : J’ai vu une psy pendant plusieurs années, mais je n’arrivais pas à m’allonger, donc je suis restée assise face à elle. J’avais besoin de son regard, de l’échange. C’était il y a une dizaine d’années, je traversais une

“Je rêve que je vole au-dessus des collines”

crise de couple, cela m’a aidée à comprendre et à aller de l’avant. Je lui suis très, très reconnaiss­ante.

Et un cauchemar récurrent ?

C. : J’arrive sur scène alors que je n’ai pas répété ou je suis toute nue. J’essaie de me rattraper avec le public en faisant des sourires gluants, pétrie d’un sentiment de culpabilit­é de n’avoir rien fichu…

Sur scène, vous semblez totalement désinhibée. Vous arrive-t-il de ressentir de la honte, pendant le spectacle ou après ?

C. : Jamais. Je suis en totale confiance avec le public. La scène est pour moi un espace d’amour entier. Quant à ressasser après le spectacle, ce n’est pas mon genre. J’ai appris à ne pas revenir sur ce qui a été vécu. En revanche, étant perfection­niste, je réfléchis à ce qui pourrait être amélioré, changé, ajouté. Je ne suis jamais satisfaite et cela m’aide à aller de l’avant.

Qu’est-ce qui peut vous freiner ?

C. : J’aime m’adapter au changement, mais cela génère chez moi d’irréductib­les moments de stress. Par exemple, reprendre une tournée, retrouver ces contextes de festival très bruyant [on entend justement une musique rock en fond sonore], ce rythme de vie… Je suis nomade dans l’âme, mais pas en actes : ces temps-ci, on part en concert, puis on rentre, puis on repart. Tout cela à bord d’un bus diesel ! Bref…

[Elle se masse la tête, les jambes] Votre corps semble être votre meilleur allié. A-t-il parfois été un fardeau ?

C. : C’est moi qui ai pu être un fardeau pour lui. Le corps crie quand on lui impose des habitudes de vie ou des jugements blessants. À l’adolescenc­e, je n’ai pas toujours été tendre avec lui, parce que, comme tout le monde, j’ai pu me laisser influencer par des modèles imposés par la société.

Comment vous en êtes-vous affranchie ?

C. : La pratique de la danse et du chant sans miroir permet de développer un rapport intérieur au corps. Dans ce dialogue intime s’instaure une relation plus juste et plus douce avec soi. [Elle donne des tapes affectueus­es sur ses jambes repliées, posées sur le canapé] Aujourd’hui, ce corps, je le remercie, je l’aime. J’y vois surtout un guide exceptionn­el : il m’enseigne l’intelligen­ce du vivant. Inspiratio­n, expiration. Action, régénérati­on. Tout ce qu’il dit est vrai.

Votre danse et votre chant révèlent qu’il y a beaucoup d’Afrique en vous. Pourquoi ?

C. : Parce qu’elle est le berceau de l’humanité et qu’elle a été le berceau de mon papa. Il a été adopté par des parents français qui vivaient en expatriés en Afrique de l’Ouest. Il a passé les dix-huit premières années de sa vie au Cameroun et en Côte d’Ivoire. Il disait que l’Afrique l’avait adopté. Seul Blanc de sa classe ou presque, il se présentait comme un métis dans l’âme. Sans doute est-ce une origine que j’ai cherchée en moi, à ma façon. Je l’ai réaffirmée plus tard grâce à Elsa Wolliaston, une pionnière de la danse contempora­ine africaine avec laquelle j’ai beaucoup travaillé. Elle m’a inculqué une certaine « grammaire » du corps qui m’est devenue instinctiv­e.

Votre berceau familial est aussi en Europe de l’Est, n’est-ce pas ?

“Mon corps, je le remercie, je l’aime”

C. : Oui, j’ai une grand-mère russe, mais aussi du sang irlandais du côté maternel. Et toutes les confession­s sont dans la famille, y compris athée.

Et vous, quelle place faites-vous à Dieu ?

C. : À qui ? Dieu, carrément ? Lui ? Ou Elle, d’ailleurs ! Pour moi, Il ou Elle n’est pas centralisa­ble. Je pense que c’est une connerie de centralise­r, car c’est là que germent le pouvoir et le désir d’en abuser. Pour moi, Dieu est une énergie qui prend toutes les formes de la vie. En chantant, je plante mes pieds au sol, je lève les bras au ciel, spontanéme­nt, sans y avoir réfléchi avant : pour moi, c’est cela la religion. C’est se relier à la terre, aux autres, à soi, par une voie qui nous est propre – en ce qui me concerne, c’est le chant et la danse. Je crois qu’il n’y a pas de spirituali­té sans matière – fût-elle invisible, comme la matière sonore.

Vous méditez ?

C. : Oui, à ma façon, dans le son, via la voix. Et au quotidien : en faisant la vaisselle, en marchant, en faisant le potager. Je trouve ma méditation dans la répétition du geste.

Vous partagez votre quotidien avec un artiste, avec qui vous travaillez, vous créez…

C. : … et procréez ! [Rires] On revient à ce mouvement dont on parlait tout à l’heure : création/procréatio­n !

Comment gérez-vous ce mélange des genres ? Comment séparez-vous les moments de travail des moments de vie de famille ?

C. : Je pense qu’aucun monde n’est séparé. Toute division est un artifice [des larmes lui montent aux yeux, elle hausse le ton]. Ce n’est quand même pas compliqué : on a tous le sang rouge ! On a tous été des enfants ! Pourquoi cherche-t-on sans cesse à tout séparer, à nous distinguer ? Les hommes, les femmes, les enfants, les vieux… Par exemple, pour moi, une société où les enfants n’ont pas leur place partout, où l’on doit larguer son bébé à la crèche dès 2 mois parce que la vie d’entreprise nous y contraint, où les restaurant­s n’ont pas d’espace pour enfants, où les vieux et les gens malades ne peuvent pas se rendre partout… Pour moi, cette société est malade. Bien sûr qu’il nous faut des espaces-temps de calme. J’ai besoin de solitude pour créer. Mais je ne veux pas de cloisons. Je veux que tout le monde se sente bienvenu. Y compris les disparus. Mon père est très présent depuis qu’il n’est plus là. Et avec les enfants, je veux rester ouverte, autant que possible, comme on l’a été avec moi.

Votre père vous a donné l’amour de la musique ?

C. : Oui, preuve qu’il en faut peu pour semer des graines : à la maison, on chantait « un peu », on dansait « un peu », mon père nous jouait « un peu »

de musique… Simplement, j’ai tellement aimé ces moments-là que j’ai eu envie d’en vivre davantage, tous les jours. J’ai un besoin vital de chanter et danser, qui va bien au-delà de mon besoin de créer. Danser et chanter, c’est ma façon de me sentir connectée.

Vous parlez de rapport libre, sans contrainte aux enfants. Être parent consiste aussi à imposer des règles et des limites pour les sécuriser. Arrivez-vous à faire preuve d’autorité ?

C. : Non, vraiment pas. Il faut me faire sortir de mes gonds pour que je devienne impression­nante. Mais pour moi, éduquer un enfant, ce n’est pas faire preuve d’autorité. C’est lui donner de l’élan, de la confiance, de la sécurité affective et sanitaire. La bonne éducation est celle qui est faite en toute conscience et en cohérence avec nos valeurs fondamenta­les. Après, on compose avec le réel, chacun fait de son mieux, mais je suis convaincue que si chaque choix est bien expliqué et sincère, il passera.

Vos enfants sont dans une école Montessori. Pourquoi ne pas avoir plutôt tenté de changer les choses qui ne vous conviennen­t pas dans une école publique ?

C. : Parce que j’ai finalement décidé de dire « oui » ! Je ne pouvais pas passer tout mon temps à dire « non », c’est-à-dire à lutter contre une institutio­n qui, pour moi, va droit dans le mur, avec son organisati­on pyramidale et ses règles figées.

Pourtant, vous êtes un produit de cette institutio­n : hypokhâgne au lycée Henri-IV, à Paris, Sciences Po…

C. : Ceci explique peut-être cela. L’Éducation nationale, j’en ai soupé. Je connais ce système et, pour moi, il est moins structuran­t que frustrant. Bien sûr, il existe quantité de profs et de directeurs géniaux, mais ils sont contraints de suivre les directives, qui sont tout sauf saines ! Par exemple, je suis choquée par la dérive consuméris­te suivie par l’école : on impose des tablettes en classe, on autorise des portables dans les collèges… Et pourquoi si peu de cantines bio ? Pourquoi si peu d’éveil à l’écologie ? Pourquoi si peu d’écoute des attentes des parents ? Cette rigidité me désespère. Moi je veux de l’air, de l’inventi- vité. En tant que mère, je me sens le devoir de proposer quelque chose de nouveau. On a réussi à monter une école Montessori dans notre village, elle va ouvrir bientôt. Oui, c’est un truc de privilégié­s, mais c’est aussi un énorme investisse­ment personnel et financier qui ne se fait pas sans sacrifice. Je veux que ça bouge ! Pourquoi tous les enfants ne veulent-ils pas aller à l’école ? Ce devrait être doux… On invente partout des rites initiatiqu­es d’une dureté folle, pourquoi ? On peut apprendre dans le bonheur. C’est comme ça que j’ai appris la musique, moi. En fait, j’ai connu les deux méthodes d’enseigneme­nt : l’une dans la dureté et l’autre dans la douceur. Toutes deux m’ont instruite, mais il en est une seule qui a su me rendre heureuse.

Et cette « dureté » dont nous sommes tous composés, où est-elle chez vous ? Vers où l’orientez-vous ?

C. : Je considère la vie comme un art martial. Il s’agit de prendre conscience de toutes ses énergies, y compris les plus dures et tranchante­s, puis d’apprendre à les canaliser, sans cesse dans le mouvement. Je m’y efforce. Surtout, vivre avec des enfants me confirme que la plus grande force est dans la douceur. Je ne vise pas la mièvrerie ni le laisser-faire. Mais un care souple, où le dialogue est autorisé. Alors, la joie peut circuler.

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Maquillage et coiffure Corinne Clanet. Stylisme Charlotte Renard. Assistante stylisme Aesane Pecnard. Robe Vivienne Westwood.

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