Trois façons de bien consoler
Pas si simple de soutenir celles et ceux que l’on aime lorsqu’ils sont dans l’épreuve et la douleur. Comment trouver les mots justes et la bonne attitude pour accompagner une séparation, un deuil, un licenciement, une maladie… ? Réponses d’experts.
Elle pleure ou il se plaint. Elle est malade ou il est terrassé… Dans tous les cas, le constat est le même : parce qu’on aime cette personne ou simplement parce qu’on fait preuve d’empathie, on se tient là, à ses côtés. On souhaiterait alléger sa peine, son affliction, ses souffrances. On voudrait consoler, remédier à la tristesse, favoriser l’issue du deuil… Parfois, on voudrait même « prendre [s]a douleur », comme l’a si bien chanté Camille. Oui, mais suffit-il de le vouloir pour savoir ? Pas si sûr. Ou plutôt, pas toujours. Car, face au chagrin, la raison est souvent impuissante, et le volontarisme sans grand effet. Pourtant, à l’heure où nous sommes de plus en plus nombreux à aspirer à davantage de solidarité, sans doute n’est-il pas vain de le rappeler : la consolation est un art qui s’apprend. Comment ? Trois spécialistes de cette question nous ont épaulés.
1 “Écouter pour apaiser” Marie de Hennezel1, psychologue et psychothérapeute
C’est une tentation à laquelle on cède presque instinctivement face à la détresse de quelqu’un dont on veut prendre soin : parler pour rationaliser. « Ne t’en fais pas : un de perdu, dix de retrouvés ! » « Avec le temps, va, tout s’en va… » Après tout, n’est-ce pas là une manière d’être présent tout en essayant de contenir ses propres difficultés ? Faire face au chagrin n’est jamais chose aisée. En réalité, autant ne pas se leurrer : inviter l’autre à tourner la page au plus vite, minimiser sa perte plutôt que de la considérer, est plus préjudiciable que salvateur, car « cela peut venir renforcer la culpabilité de l’affligé », explique Marie de Hennezel.
Alors, que dire ? Peut- être pas grand- chose, justement. Sans doute est-il même d’abord question d’écouter… La clé pour y parvenir sans être
débordé ? « Être ancré dans sa base, ou dans ce que les Japonais nomment hara [ le ventre, réservoir de notre énergie, ndlr] », répond celle qui anime aussi des formations à l’accompagnement de la fin de vie. Car, pour la spécialiste, c’est une certitude : nous ne pouvons écouter véritablement que si nous parvenons à rester en contact étroit avec notre corps et nos propres perceptions, si nous cessons de nous référer constamment à notre cortex, c’est-à-dire à nos pensées…
Difficile ? « Être attentif à l’autre tout en le restant aussi à ce qui se passe en soi n’est pas aussi compliqué qu’on l’imagine, mais les gens n’en ont pas l’habitude. Pourtant, cette posture d’écoute est une aptitude qui s’acquiert et s’exerce, notamment par le biais de la méditation de pleine conscience ou l’haptonomie. » Ce qu’elle permet ? Offrir son soutien et son accueil, sans jamais se sentir envahi ou menacé. « Cette présence ouverte qui vise à rester attentif à ses sensations autorise à être plus calme et, surtout, à laisser tout l’espace au blessé pour qu’il puisse librement parler et pleurer, poursuit Marie de Hennezel. C’est ensuite que prendre la parole, notamment pour dire à celui ou celle qui souffre ce que l’on perçoit de sa capacité à traverser l’épreuve, peut véritablement l’aider à évoluer et à avancer. » 1. Chroniqueuse à Psychologies ( lire p. 74) et auteure de Croire aux forces de l’esprit (FayardVersilio). Son blog : slog.fr/mariedehennezel.