Psychologies (France)

« Je n’aide pas ma femme

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C’EST UNE PETITE VIDÉO ANONYME qui circule sur les réseaux sociaux depuis la mi-juillet1. Elle raconte l’histoire de deux amis, dont l’un est venu prendre le café chez l’autre. Au bout d’un moment, l’hôte interrompt la conversati­on en expliquant qu’il doit aller faire la vaisselle. Son ami, « un peu irrité », lui fait remarquer : « Je trouve ça génial que tu aides ta femme, moi quand je l’aide, elle ne me remercie jamais. La semaine dernière j’ai passé la serpillièr­e et aucun remercieme­nt. » « Là, dit le premier, je lui ai expliqué que je n’aidais

pas ma femme. » Et en quelques phrases, il assène : « Ma femme n’a pas besoin d’aide. Elle a besoin d’un partenaire. Je n’aide pas ma femme à nettoyer la maison, je la nettoie, car je vis ici. Je n’aide pas ma femme à cuisiner. Je cuisine, car j’habite ici. Je n’aide pas ma femme à faire la vaisselle, je la fais, car je l’utilise aussi. Je n’aide pas ma femme avec les enfants. Je m’occupe d’eux, car ce sont aussi mes enfants. Je n’aide pas ma femme à faire les lessives. Je les fais, car c’est aussi mon linge et celui de mes enfants. » Et d’insister : « Je ne suis pas une “aide” à la maison.

Je suis un membre de la famille. Ça te fait bizarre d’entendre ça ? Tu nettoies le sol une fois dans ta vie et tu attends des remercieme­nts… Mais pourquoi ? Quand as-tu remercié ta femme pour la dernière fois d’avoir fait la lessive, cuisiné ou s’être occupée des enfants ? Peut- être pensais-tu que c’était son boulot ? Peut- être pensais-tu encore que ces tâches se faisaient toutes seules ? » Sa conclusion : « Le vrai changement commence à la maison. » Ces deux minutes virales semblent sorties d’un

autre âge, et pourtant… Elles font écho à une BD partagée quelques semaines plus tôt par des centaines de milliers de personnes sur Facebook : « Fallait demander », des scènes de la vie quotidienn­e dessinées par une ingénieure informatiq­ue de 36 ans, Emma, pour dénoncer la « charge mentale » qui pèse aujourd’hui encore sur les femmes.

Cette notion, utilisée dans les années 1980 pour décrire les conséquenc­es psychiques de l’intensific­ation du travail2, a remis au goût du jour la fameuse « double journée », et refait parler de l’épuisement de celles qui doivent penser à tout, en plus de leur quotidien profession­nel : des tâches ménagères à la gestion des plannings scolaires en passant par les rendez-vous médicaux, les loisirs et les vacances. Sans oublier la « charge émotionnel­le » ajoutée, entre les chagrins des uns et les maladies des autres… Le tout aggravé par les flux de SMS et de mails à gérer. Quel tableau ! Mais comment font-elles pour tenir ? Certains foyers se répartisse­nt heureuseme­nt d’égal à égal la gestion de la vie familiale, mais environ 65 % du travail domestique et parental revient encore aux femmes3. Et si en cette rentrée 2017, vous décidiez, vous toutes et tous qui vivez en couple, de prendre un nouveau virage, celui du partage ? Participer, chez soi, à réduire les inégalités et à faire évoluer la société, c’est un beau défi, non ? P.- S. : Racontez-nous votre expérience du partage sur Psychologi­es.com, dans le forum « Le quotidien dans le couple », « Je refuse ma part de charge mentale ! Comment partager ? ». 1. « Je n’aide pas ma femme », visible sur YouTube. 2. Lire à ce sujet l’enquête de Cécile Daumas, « L’inattendu retour de la “charge mentale” », parue dans Libération du 28 juin 2017. 3. Source : Insee, octobre 2015.

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Laurence Folléa, directrice de la rédaction

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