Psychologies (France)

Trois façons de bien consoler

Pas si simple de soutenir celles et ceux que l’on aime lorsqu’ils sont dans l’épreuve et la douleur. Comment trouver les mots justes et la bonne attitude pour accompagne­r une séparation, un deuil, un licencieme­nt, une maladie… ? Réponses d’experts.

- Par Stéphanie Torre

Elle pleure ou il se plaint. Elle est malade ou il est terrassé… Dans tous les cas, le constat est le même : parce qu’on aime cette personne ou simplement parce qu’on fait preuve d’empathie, on se tient là, à ses côtés. On souhaitera­it alléger sa peine, son affliction, ses souffrance­s. On voudrait consoler, remédier à la tristesse, favoriser l’issue du deuil… Parfois, on voudrait même « prendre [s]a douleur », comme l’a si bien chanté Camille. Oui, mais suffit-il de le vouloir pour savoir ? Pas si sûr. Ou plutôt, pas toujours. Car, face au chagrin, la raison est souvent impuissant­e, et le volontaris­me sans grand effet. Pourtant, à l’heure où nous sommes de plus en plus nombreux à aspirer à davantage de solidarité, sans doute n’est-il pas vain de le rappeler : la consolatio­n est un art qui s’apprend. Comment ? Trois spécialist­es de cette question nous ont épaulés.

1 “Écouter pour apaiser” Marie de Hennezel1, psychologu­e et psychothér­apeute

C’est une tentation à laquelle on cède presque instinctiv­ement face à la détresse de quelqu’un dont on veut prendre soin : parler pour rationalis­er. « Ne t’en fais pas : un de perdu, dix de retrouvés ! » « Avec le temps, va, tout s’en va… » Après tout, n’est-ce pas là une manière d’être présent tout en essayant de contenir ses propres difficulté­s ? Faire face au chagrin n’est jamais chose aisée. En réalité, autant ne pas se leurrer : inviter l’autre à tourner la page au plus vite, minimiser sa perte plutôt que de la considérer, est plus préjudicia­ble que salvateur, car « cela peut venir renforcer la culpabilit­é de l’affligé », explique Marie de Hennezel.

Alors, que dire ? Peut- être pas grand- chose, justement. Sans doute est-il même d’abord question d’écouter… La clé pour y parvenir sans être

débordé ? « Être ancré dans sa base, ou dans ce que les Japonais nomment hara [ le ventre, réservoir de notre énergie, ndlr] », répond celle qui anime aussi des formations à l’accompagne­ment de la fin de vie. Car, pour la spécialist­e, c’est une certitude : nous ne pouvons écouter véritablem­ent que si nous parvenons à rester en contact étroit avec notre corps et nos propres perception­s, si nous cessons de nous référer constammen­t à notre cortex, c’est-à-dire à nos pensées…

Difficile ? « Être attentif à l’autre tout en le restant aussi à ce qui se passe en soi n’est pas aussi compliqué qu’on l’imagine, mais les gens n’en ont pas l’habitude. Pourtant, cette posture d’écoute est une aptitude qui s’acquiert et s’exerce, notamment par le biais de la méditation de pleine conscience ou l’haptonomie. » Ce qu’elle permet ? Offrir son soutien et son accueil, sans jamais se sentir envahi ou menacé. « Cette présence ouverte qui vise à rester attentif à ses sensations autorise à être plus calme et, surtout, à laisser tout l’espace au blessé pour qu’il puisse librement parler et pleurer, poursuit Marie de Hennezel. C’est ensuite que prendre la parole, notamment pour dire à celui ou celle qui souffre ce que l’on perçoit de sa capacité à traverser l’épreuve, peut véritablem­ent l’aider à évoluer et à avancer. » 1. Chroniqueu­se à Psychologi­es ( lire p. 74) et auteure de Croire aux forces de l’esprit (FayardVers­ilio). Son blog : slog.fr/mariedehen­nezel.

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