L’INTERVIEW DE RICHARD SÈVE
Le maître chocolatier a ouvert à Limonest, près de Lyon, le premier musée-manufacture du chocolat, le Musco. Un lieu unique où s’imbriquent l’histoire et la fabrication du chocolat.
Régal : Comment est née l’idée de ce musée du chocolat ? Richard Sève : Avec Gaëlle, mon épouse, nous avons ouvert notre première boutique il y a 28 ans. Les débuts ont été difficiles car ni elle ni moi n’étions issus d’une famille de chocolatiers. Dès le départ, on voulait travailler le chocolat à partir de la fève de cacao. En 2012, Gaëlle a passé un diplôme de management. Son mémoire portait sur la construction à Limonest de ce site de production accolé à un lieu éducatif. Cinq ans plus tard, le Musco ouvrait ses portes.
R : En quoi ce musée est-il différent ? R. S. Ce n’est pas juste un musée, c’est aussi un lieu de production. D’un côté, on retrace l’histoire du cacao, dans l’esprit d’un cabinet de curiosités. De l’autre, on peut voir, suivre et goûter chaque étape du processus de transformation du chocolat, de la fève à la tablette.
R : D’où viennent les machines qu’on voit en action ? R. S. Nous avons sillonné toute l’Europe pendant six ans pour les dénicher. D’anciens artisans chocolatiers de la Loire, rachetés et remerciés par des industriels, ont fait du repérage pour nous. Ces papys étaient heureux de partir en vadrouille et de transmettre leur savoir-faire. Certaines
de ces machines datent des années 1940. Il a fallu les rénover, les mettre aux normes. C’était long. Nous aurions pu faire les choses plus rapidement en achetant les espèces de « dînettes » qui se vendent actuellement. Mais comme on dit, c’est dans les vieux chaudrons…
R : Comment les fèves de cacao arrivent-elles jusqu’ici ? R. S. Nous allons d’abord sur place pour voir comment la plantation est entretenue. On goûte les fèves crues, à la cueillette, et après l’étape de fermentation. Nous procédons ensuite à des analyses bactériologiques, pour vérifier que les fèves ne soient pas contaminées par les sols ou autres. Puis le cultivateur transporte notre commande jusqu’au port le plus proche de sa plantation. Les sacs de fèves sont placés dans des containers et acheminés par bateau jusqu’au Havre. De là, un camion prend le relais jusqu’au Musco.
R : Tout ce travail de « bean-to-bar », de la fève à la tablette, est-ce que le consommateur l’apprécie au final ? R. S. Oui, car nous avons une clientèle avertie. Mais le but d’un lieu comme celui-ci, ouvert à tous les publics, aux écoles, à la petite enfance, est d’éduquer les papilles des consommateurs. Même s’ils ne goûtent qu’une fois un chocolat de grande qualité, ça sera déjà ça de pris !