Les douze routes de Gettysburg
AU XIXE SIÈCLE, ELLES SONT EN EFFET PAS MOINS DE DOUZE,
ceignant la localité de toutes parts: Chambersburg Pike; Mummasburg Road; Newville Road; Carlisle Road; Harrisburg Road ; Hunterstown Road ; York Road ; Hanover Road ; Baltimore Pike; Taneytown Road; Emmitsburg Road; Fairfield Road. En pleine Guerre de Sécession (1861-1865), ce singulier carrefour de Pennsylvanie n’allait ainsi échapper ni aux desseins des stratèges, ni aux affres des soldats.
Juin 1863. À l’Est, en dépit d’âpres combats, les armées fédérale et confédérée stagnent. Elles occupent les positions qui étaient les leurs en début du conflit, deux ans auparavant. Malgré son retentissant succès à Chancellorsville en mai, le général Robert E. Lee se sait sous pression: son camp ne dispose que de ressources inférieures et, sur le long terme, c’est le Nord qui logiquement devrait l’emporter. Aussi, las des dévastations subies par sa terre natale de Virginie, il consent un pari risqué: envahir une seconde fois le Maryland et la Pennsylvanie, afin de forcer une issue politique par une victoire décisive. Un tel résultat, calcule-t-il, obligera le président Lincoln à négocier la paix et à accorder au Sud l’indépendance qu’il recherche et que, déjà, plusieurs puissances songent à lui reconnaître. Alors que, déchiré, le pays lorgne sur l’immensité des terres de l’ouest, les sudistes aspirent en effet à un empire esclavagiste, qui pourrait englober Cuba, une partie du Mexique et de larges territoires jusqu’au Pacifique. Les nordistes, eux, redoutent que leurs petites exploitations d’hommes libres ne puissent survivre à l’expansion de cet inéquitable modèle économique.
ORDRE DE MARCHE
C’est dans ce contexte capital que l’Armée de la Virginie du Nord reçoit son ordre de marche. Elle se met en mouvement, progressant furtivement à l’abri de la vallée de Shenandoah. Ses 70000 soldats et son convoi de 60 chariots s’étendent ainsi sur près de 95 kilomètres. Ne pouvant souffrir nouvelle humiliation militaire, l’Armée du Potomac, forte de ses quelque 90 000 hommes, se lance à la poursuite de l’envahisseur, afin de protéger les cités de Baltimore,Washington, Harrisburg et Philadelphie. Apprenant que le général George G. Meade, fraîchement nommé par Lincoln, est à ses trousses, Lee ordonne aux différents corps épars de son armée de se rassembler. Sa décision est d’autant plus nécessaire qu’il est sans nouvelles de sa cavalerie, partie audacieusement piller le ravitaillement fédéral. Le voici par conséquent aveugle, sans idée sur la position de ses adversaires. Se sachant en outre en infériorité numérique, il envoie des ordres qui se veulent clairs: ne pas engager l’ennemi avant que la totalité des troupes confédérées ne soit réunie.
Alors que, déchiré, le pays lorgne sur l’immensité des terres de l’ouest, les sudistes aspirent en effet à un empire esclavagiste, qui pourrait englober Cuba, une partie du
Mexique et de larges territoires jusqu’au Pacifique.
Pourtant, à son grand dam, la bataille commence le 1er juillet, de façon impromptue. Soucieux de quérir informations, denrées et équipement, le général Henry Heth chemine sur Chambersburg Pike, direction Gettysburg. Mal renseigné, il croit la bourgade aux mains d’inoffensifs miliciens fédéraux. C’est sans compter sur le commandant de cavalerie de l’Union, John Buford, dont le jugement s’avère ici décisif.Ayant diligemment identifié les unités adverses, il a repéré le terrain favorable