Eric Clapton & Friends
“The Breeze, An Appreciation of JJ Cale” SURFDOG/UNIVERSAL A part égale avec les bluesmen qui marquèrent au fer rouge son adolescence, JJ Cale aura été l’influence majeure d’Eric Clapton. Il lui dut deux succès notoires (“After Midnight”, qui lança sa carrière solo en 1970, “Cocaine” en 1977), s’inspira de son country-rock languide sur ses albums seventies jusqu’à le plagier (“Lay Down Sally”) et ne cessa jamais d’enregistrer ses morceaux, y compris sur son dernier album, “Old Sock”. Pas ingrat, le guitar hero britannique paya l’ardoise — et réalisa un rêve — en enregistrant au côté du rocker de Tulsa le réussi “The Road To Escondido” (2006). Il continue de le faire, un an tout juste après la mort de Cale, avec cet album-hommage au casting bien pensé, qui associe collaborateurs claptoniens (Nathan East, Jim Keltner) et authentiques okies proches de Cale (les batteurs Jimmy Karstein et Jamie Oldaker, Christine Lakeland, compagne et compositrice, le guitariste Reggie Young). Sûr, le côté bricolé des enregistrements de Cale a laissé place à un groove plus robuste, un son plus moderne, mais Clapton s’est bien gardé de surcharger la barque. Tout cela respire et laisse en lumière ces chansons miraculeuses, tranches de boogie immensément malicieuses avec éclats blues et country, vignettes d’une Amérique assumant sa marginalité, son indolence. Clapton glisse une poignée de solos exquis (“Sensitive Kind”, joyau du répertoire calien) mais laisse volontiers le chant ou la guitare lead à ses invités (Mark Knopfler, Tom Petty, Willie Nelson...). Jamais Slowhand n’avait ainsi poussé l’art de l’effacement, jusque sur la pochette, comme un écho à la légendaire modestie de son mentor. BERTRAND BOUARD