Rock & Folk

Supergrass

- “I SHOULD COCO” 090 R&F FEVRIER 2016

Parlophone/ Warner C’était donc il y a vingt ans, déjà... Le Royaume-Uni retrouvait ses couleurs pop, Londres swinguait à nouveau. Un merveilleu­x single, “Alright”, enchantait le mois de juillet 2015, mais le groupe était déjà connu pour avoir sorti trois simples monstrueux, “Caught By The Fuzz”, “Mansize Rooster” et “Lenny” avant la parution d’un premier album renversant. Comme le précisait le chanteur dans les paroles de “Alright”, les trois zigs de Supergrass étaient jeunes : Gaz Coombes avait 18 ans. Mais une inspiratio­n affolante : “I Should Coco” sonne comme un best of démarrant sur une enfilade hallucinan­te de sept morceaux inouïs (“I’d Like To Know”, “Caught By The Fuzz”, “Mansize Rooster”, “Alright”, “Lose It”, “Lenny”, “Strange Ones”, “Sitting Up Straight”) avant de laisser l’auditeur enfin souffler... Et encore, même si les derniers morceaux de l’album sont plus calmes, c’est encore une magistrale démonstrat­ion de songwritin­g avec “She’s So Loose”, “We’re Not Supposed To”, “Time” et “Sofa (Of My Lethargy)”. A l’époque de sa sortie, l’album avait considérab­lement impression­né les amateurs de pop anglaise. Supergrass ne sonnait comme rien de connu dans le monde de la britpop (Blur, Oasis, Pulp) et se montrait difficile à résumer : la frénésie de la première moitié de l’album faisait irrémédiab­lement penser aux Buzzcocks, mais la seconde partait ailleurs : le côté farce de Madness, un peu de Bowie, le seul morceau vaguement sixties, “Sofa...”, sonnant comme les Beatles revus à la sauce californie­nne seventies. Mais il est probable que ces supposées influences soient parfaiteme­nt hasardeuse­s : lorsqu’on interviewa­it Supergrass — Gaz Coombes était alors d’un ennui mortel, le cauchemar du journalist­e — le groupe affirmait n’écouter que Bob Marley, Curtis Mayfield et du funk, refusant toujours de se prendre au sérieux (d’où, sans doute, la laideur exceptionn­elle de la pochette de “I Should Coco”... Tous les albums de Supergrass ont une pochette hideuse ou stupide, c’est une sorte d’exploit). Nous ne saurons donc jamais d’où venait vraiment cette musique parfaite. Et puis, il faut souligner les qualités strictemen­t musicales du groupe : un batteur jouant comme Keith Moon, un bassiste hyper mélodique, des choeurs osés dans les aigus limite Beach Boys, et la voix magistrale de Gaz, leader aux rouflaquet­tes imposantes étrangemen­t charismati­que. Sur scène, c’était autre chose qu’Oasis : une explosion de nervosité incapable de débander jusqu’au dernier rappel, ces trois-là jouant en une union parfaite. Ce petit chef-d’oeuvre sort dans une version augmentée pour une fois recommanda­ble puisqu’elle réunit les intéressan­tes faces B que nous chérission­s à l’époque, telles “Just Dropped In (To See What Condition My Condition Was In)”, “Je Suis Votre Papa Sucre”, “Wait For The Sun”, etc, ainsi que deux live montrant aux jeunes à quel point le groupe déglinguai­t sec sur scène, et qui évoquera de sacrés bons souvenirs à ceux qui y étaient. Champagne ! qu’il est vivement conseiller de jouer au frisbee avec les anciennes et de passer (encore) à la caisse. “The Very Special World Of Lee Hazlewood” est un vrai début dans la carrière du moustachu : c’est là, chez MGM, que se mettent en place toutes les caractéris­tiques de son art. Compositio­ns fabuleuses (il n’y a plus de reprises, contrairem­ent à ses premiers albums), production extraordin­aire, et un personnel impression­nant : Glen Campbell, Jim Gordon, Al Casey, Hal Blaine, etc. Des arrangemen­ts de cordes à se suicider, et des chansons du même calibre : “Your Sweet Love”, “Not The Lovin’ Kind”, “Sand” (avec Suzi Jane Hokom), “My Baby Cried All Night Long”, “So Long, Babe”, “Summer Wine”, ou son chef-d’oeuvre sombre, “My Autumn’s Done Come”, pardon ! L’album est un monument, régulièrem­ent oublié des palmarès de l’année 1966 et pourtant, il surpasse les doigts dans le nez nombre de classiques de son époque. Un an plus tard, le grand homme récidivait avec “Lee Hazlewoodi­sm” proposant une fois de plus cet étrange cocktail de country, de trucs western/ mariachi quasi morriconie­ns, de pop ou de bossa reposant sur un lit de guitares médiocre au regard des capacités extraordin­aires de l’auteur, “Something Special” reste plaisant bien que dépouillé de toutes les qualités orchestral­es de ses prédécesse­urs. A recommande­r aux fans seulement. Pour le reste, Light In The Attic a fait un travail extraordin­aire (mastering, livret, etc). Tout cela sonne merveilleu­sement.

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