En sucette
Le Hellfest arrivant à grands pas, le fan souffrant de pointillisme aigu ou soucieux de paraître moins boeuf devant l’éclectisme de la programmation proposée arrivera dans la plaine de Clisson avec (Le Lombard) des duettistes Jacques de Pierpont (au texte) et Hervé Bourhis (aux crayons) bien calé dans la poche arrière. L’ouvrage est peut-être de petit format, il regorge, voire fourmille d’informations essentielles pour bien comprendre pourquoi toutes les différences dans le heavy metal, le hard rock ou le metal tout court sont autant de similitudes. Fidèle à son style habituel, Bourhis dessine beaucoup d’après documents mais, cette fois, le résultat est encore plus didactique grâce aux connaissances du scénariste sur le sujet qu’il présente de manière chronologique à travers les grands groupes classiques, l’évolution des styles, les moments forts, etc. Petit mais costaud. Natif d’Australie, Peter Duggan’s s’installe à Londres pour travailler dans une galerie d’art. Ce qui lui a permis de rencontrer pas mal d’artistes qui ont servi de terreau pour l’élaboration de (Flammarion). Pour ce qui est de la présence du mot dans le sous-titre, nul ne pourra reprocher une utilisation abusive tant l’auteur n’y va pas avec le dos de la main morte dès qu’il s’agit de se payer la fiole des artistes connus, critiques, galeristes qui composent le petit monde de l’art. Venant d’un connaisseur expérimenté du système doublé d’un dessinateur de presse en exercice, le résultat est au-delà des espérances tant le tir aux pigeons fait mouche à chaque coup. Pour comprendre la blague sur la pochette de “Sgt Pepper’s...” réalisée par Peter Blake, l’auteur fait référence à la rencontre entre Lennon et Allen Ginsberg après un concert de Dylan au Royal Albert Hall le 9 mai 1965 où les deux hommes parlent de William Blake. Les pages consacrées au pop art sont définitivement sublimes tant elles frappent juste.
(Warum) de Rob Davis est une étrange BD qui, au prime abord, peut faire penser à une oeuvre autant cryptique que magnifique mais, aussi, tellement proche de la masturbation intellectuelle qu’un avertissement s’impose avant lecture. L’univers créé par Rob Davis est vaste. On peut éventuellement imaginer le lapin de “Alice Au Pays Des Merveilles” revu par David Lynch en train de se taper un trip de LSD avant d’ouvrir cette BD et de s’y immerger totalement. Pour apprécier la chose, il faudra éviter toutes les formes de distraction sous peine de rater l’expérience psychédélique sans drogue de l’année. Tout commence avec une météorologue qui indique avant qu’il ne se mette à pleuvoir des lames de couteau. Vaste programme qui devrait plaire aux amateurs d’expériences interdites. En pleine période de primaires américaines où les Donald Trump et ses rivaux se déchaînent dans le populisme à deux balles, il est des BD qui tombent bien tant elles rappellent comme l’homme politique est surtout et avant tout un danger pour la démocratie. Ici, la piqûre de rappel s’intitule (Glénat) et elle est due aux talents conjugués du dessinateur Ransom Getty (“War Of The Green Lantern”) et du scénariste Max Bemis, plus connu dans ces pages comme chanteur du groupe punk pop Say Anything. En gros, un homme politique qui rêve de présidence tente de manipuler Reese, une chanteuse de rap très engagée, afin de convaincre ses fans de voter pour lui. Evidemment, tout se barre en sucette très vite... Cette histoire de pouvoir totalitaire en marche est si bien racontée qu’on en arrive à se demander si ce n’est pas le rêve secret des Américains afin d’entrer en résistance. C’est un peu le thème récurrent sur les écrans depuis “Star Wars”, “V” et “Falling Skies” ; alors pourquoi pas dans la BD ?