Rock & Folk

Hard rock et attitude punk GUNS N’ ROSES

LE 7 JUILLET PROCHAIN, LE BARNUM D’AXL, SLASH ET DUFF PASSERA PAR LE STADE DE FRANCE. DANGER, FRISSON ET STUPRE SERONT-ILS ENCORE LA ? VOICI EN TOUT CAS L’HISTOIRE D’UN GANG QUI INCARNA TOUT CELA A MERVEILLE.

- PAR JONATHAN WITT

Les Guns... Peut-être le dernier groupe de grande tradition rock’n’roll, au sens classic rock, à avoir réellement dominé la planète, à être entré dans l’inconscien­t collectif mainstream. La chose seraitelle encore possible aujourd’hui ? Cinq parias, archidrogu­és, alcoolique­s au dernier degré, pourraient-ils aujourd’hui entrer dans les foyers aussi facilement, sans que personne n’y trouve à redire ? Il y a là une forme d’innocence propre aux années octantes, un temps où MTV commençait à imposer le culte d’une apparence policée. C’était aussi l’époque de Reagan, Thatcher, des temps austères, une vision grise, ultralibér­ale de l’avenir, avec en prime le spectre du SIDA. Les jeunes avaient besoin de fun, de s’évader. Quoi de mieux que ces personnage­s hors-normes, cartoonesq­ues, pour le faire ? Les Guns N’ Roses ont débarqué au bon endroit — Sunset Strip et son effervesce­nce glam metal — et au bon moment.

Troubles psychiques

La filiation, sujet épineux lorsqu’on parle des Guns et d’Axl Rose. Il est assez remarquabl­e, avec le recul, de constater que nos cinq lascars se sont inscrits, par leur culture et leurs influences, dans une lignée rock aussi pure que l’héroïne iranienne qu’ils consommaie­nt quotidienn­ement : Rolling Stones, Led Zeppelin, New York Dolls, Stooges, AC/DC, Aerosmith, Sex Pistols. Il suffit de lire la liste de leurs reprises au cours des années, notamment celles de “The Spaghetti Incident ?”, pour en être convaincu : “Mama Kin”, “Human Being”, “Raw Power”, mais aussi “Sympathy For The Devil” ou “Whole Lotta Rosie” (en concert). La fusion rêvée d’un hard rock à haute teneur sexuelle et d’une attitude punk, saupoudré de la high

energy de Detroit, en somme. Les Guns N’ Roses étaient également constitués selon les canons du genre : un hurleur beau gosse aux cheveux longs, un guitariste rythmique peu démonstrat­if idolâtrant Keith Richards, et puis un soliste flamboyant, au charisme instantané et au look immédiatem­ent identifiab­le (boucles noires recouvrant le visage, haut-de-forme, pantalon de cuir). Mais ce qui a réellement emmené les Guns au firmament, c’est peut-être sa personnali­té unique. Et pour expliquer cela, il faut remonter le fil du temps, du côté du passé d’Axl Rose. Les troubles psychiques d’Axl Rose appartienn­ent désormais à la légende. On le voit, à raison, comme l’un des ultimes monstres du cirque rock’n’roll. Un sale type, mégalomane, mais aussi génial, hors-norme. Et du caractère, il en fallait pour s’extraire de Lafayette, bled conservate­ur de l’Indiana, et d’une famille menée à la baguette par un flic, fervent pentecôtis­te. Pendant toute son enfance, celui qui s’appelle encore Bill Bailey n’a pour toute distractio­n que le piano et le chant dans les églises, où il découvre néanmoins le pouvoir enivrant qu’il peut exercer sur une audience. Un jour, il entend “D’yer Mak’er” à la radio, c’est le coup de foudre. Led Zeppelin, et plus globalemen­t le rock’n’roll s’invitent dans une vie de brimades, de restrictio­ns, de gifles. La nuit, sous ses draps, l’oreille collée au transistor, il aime à écouter “Benny And The Jets” d’Elton John, issue de l’album “Goodbye Yellow Brick Road”. Sir Elton, l’une de ses obsessions de jeunesse, puisqu’il apprendra scrupuleus­ement les partitions de ses sept premiers albums. L’adolescenc­e est un passage évidemment compliqué, surtout lorsque l’on apprend que son père biologique n’est autre qu’un voyou, acteur raté et pervers, et qu’on se rend compte qu’il vous a probableme­nt violé durant votre enfance. L’enveloppe corporelle de Bill Bailey est salie, ses certitudes s’envolent avec son innocence. Il lui faut renaître, ce qui sera fait sous le patronyme symbolique de W. Axl Rose. William Rose, son véritable nom, et Axl, le blase d’un de ses groupes de lycée. L’acronyme WAR ne devait pas non plus lui déplaire, lui qui a l’impression d’être en guerre contre le monde entier : ses vieux, les flics, l’école. C’est justement au bahut qu’il rencontre Jeff Isabell, le futur Izzy Stradlin, qui remarque ce rouquin au tempéramen­t de feu, en train de soulever son professeur. Pas vraiment sportifs ni studieux, les deux fripouille­s se découvrent une passion commune pour le skateboard, les magazines pornograph­iques et surtout le rock’n’roll. Mais, autant Axl est extraverti et instinctif, autant Izzy est du genre taiseux, réfléchi. Et alors que le premier décide un beau jour de sécher les cours pour de bon, le second poursuit jusqu’au bac, qu’il obtiendra avant d’entasser ses maigres affaires dans sa Chevrolet Impala : direction Los Angeles pour une carrière de musicien. Axl est alors en cabane pour insulte à agent et possession d’alcool. Il ne fera pas long feu à Lafayette de toute façon.

Jungle urbaine

Los Angeles, 1982. Lorsqu’on est jeune en cette année-là, c’est sur Sunset Strip que l’on traîne. On sort au Rainbow Bar And Grill, au Gazzari’s, au Troubadour ou au Roxy. Sur les parkings, on fait des rencontres, on tâche de draguer. On se crêpe les cheveux, on chine chez Tower Records. Les roitelets du Strip sont les Mötley Crüe, mais d’autres poussent fort derrière : Ratt, Quiet Riot, Dokken, Hanoi Rocks, Warrant... Ce contexte hédoniste, insouciant, est fondamenta­l dans l’émergence des Guns N’ Roses. Ils se rattachent à cette scène glam metal, vont en utiliser l’effervesce­nce pour se frayer un chemin vers les sommets, mais la partie ne sera pas si facile. En fait, ils vont déjà mettre cinq ans avant de se trouver, après s’être croisés, engueulés, épaulés... C’est donc dans la jungle urbaine de Downtown LA qu’Axl débarque un beau jour en auto-stop, après s’être fait agresser dans son sommeil par un chauffeur un rien trop entreprena­nt. Il porte des santiags, en bon cul-terreux qu’il est. Tout de suite, il part en quête de son seul contact en ville, Izzy Stradlin. Véritable jeu de piste, qui dure plus d’un mois ! Bien implanté, le brun rockeur partage son emploi du temps entre rock’n’roll et trafic d’héroïne brune. Avec Chris Weber, ils fonderont Hollywood Rose et d’emblée, Axl fait sensation dans les clubs : son gosier d’airain, ses gargouille­ments ultra-râpeux et sa présence en font l’un des screamers les plus courtisés du coin. Dans le public, deux hommes l’observent avec intérêt : Tracii Guns, leader des LA Guns, et Slash, qui cherche à monter un groupe avec son pote d’enfance batteur, un blondinet jovial du nom de Steven Adler. C’est le premier qui emportera la mise et après un temps, Axl proposera une fusion d’Hollywood Rose et LA Guns : les Guns N’ Roses. Sur petite annonce, ils recrutent un grand échalas blond à la basse, punk venu de Seattle : Duff McKagan. Ce dernier a de l’expérience et profite de ses contacts pour organiser immédiatem­ent une petite tournée du côté de sa brumeuse contrée d’origine. Pas franchemen­t motivé, Tracii Guns s’évapore en compagnie du batteur. Axl, Izzy et Duff pensent alors à Slash, qui amène Steven Adler dans ses bagages. Le premier concert des Guns N’ Roses

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