Saint Etienne

HEAVENLYRECORDINGS/PIAS Plus d’un quart de siècle que Saint Etienne réalise ses fantasmes pop, avec une élégance jamais démentie. Obsessionnel et érudit (des chanteuses sixties aux groupes les plus obscurs de la C86, de bandes originales en chansons sur le ballon rond), toujours à la tête de projets divers et excitants (documentaires sur Londres, compilations thématiques, livres, etc.), le trio formé par Bob Stanley, Pete Wiggs et Sarah Cracknell revient, après cinq années de silence, avec un neuvième album tout entier dédié au charme rétro des comtés domestiques entourant Londres — un peu comme si Étienne Daho avait enregistré un disque sur la Petite Couronne. “Home Counties” sonne et résonne comme le parfait résumé d’un parcours sans tache, au cours duquel le groupe a sympathisé avec ledit Daho, samplé Jacques Vendroux, invité Oasis en première partie et repris Neil Young ou Candlewick Green. Il passe ainsi en revue, comme à la parade, les marottes musicales et mélodiques du trio. Alors que ses messieurs se prennent pour Orchestral Manoeuvres In The Dark le temps du robotique “Magpies Eyes”, madame est à la fois Brigitte et Jane sur le très gainsbourien “Take It All In” avant de musarder façon Debbie — époque Moroder — sur l’enjoué “Out Of My Mind”. “Dive” accompagne la fièvre d’un samedi soir en pleine campagne anglaise — boule à facettes déglinguée et parquet en guise de dancefloor — alors que “Whyteleafe” célèbre une rencontre fantasmée dans un wagon délabré avec un David Bowie déguisé en major Tom. Addictif, donc. Parfaite collection de vignettes pop où les arrangements électorganiques font merveille et les mélodies collent aux tympans, “Home Counties” est un épatant plongeon au coeur d’une Angleterre amochée. Mais de toute beauté. ✪✪✪✪ GABRIELLE NICOLAS