Rock & Folk

GRATEFUL DEAD

Trésors pour tout Deadhead digne de ce nom, le concert du groupe de Jerry Garcia à l’université de Cornell sort dans une version splendide en même temps qu’un documentai­re de quatre heures.

- RECUEILLI PAR BERTRAND BOUARD Album “Cornell 77” BO 3-CD de “Long Strange Trip” (Warner)

Pour la première fois depuis 30 ans, le Dead a placé à la mi-mai 2017 un album dans le top 10 des charts américains. La pérennité du groupe de San Francisco est un fait acquis de longue date, mais c’est leur plus légendaire joyau que ses archiviste­s venaient de ressortir de la salle des trésors. Le 8 mai 1977, le groupe livra à l’université de Cornell, dans l’Etat de New York, un show de 2 heures 41 si brillant que ses bandes (non-officielle­s !) furent archivées en 2011 à la Bibliothèq­ue du Congrès. L’entame du second set, “Scarlet Begonias”/ “Fire On The Mountain”, emmenée par la basse séismique de Phil Lesh, est particuliè­rement monumental­e. Récupérées après des décennies de recherche, les bandes master multipiste­s sont arrivées juste à temps pour le quarantièm­e anniversai­re de cet Himalaya du Mort

Reconnaiss­ant. Début juin 2017, c’est un documentai­re de quatre heures, “Long Strange Trip”, réalisé par Amir-Bar Lev et produit par Martin Scorsese, qui a apporté une pierre supplément­aire à l’édificatio­n d’une légende chaque année plus vertigineu­se. Depuis la baie de Marin County où il réside depuis bientôt cinquante ans, le guitariste et chanteur Bob Weir, toujours actif avec Dead & Company aux côtés de Mickey Hart, Bill Kreutzmann et du guitariste John Mayer, a partagé par téléphone quelques souvenirs.

Les doigts chauds

Rock&Folk : Aviez-vous la sensation lors de cette tournée 77 d’un niveau de jeu exceptionn­el ?

Bob Weir : Je dirais que oui, mais il y a eu d’autres moments où j’avais eu l’impression qu’on était meilleurs, plus carrés. Mais c’était une bonne année et une bonne tournée, sans aucun doute. On avait beaucoup tourné, on avait les doigts chauds... Les morceaux de “Terrapin Station” ont également joué un rôle : avoir de nouvelles chansons aide toujours. Si j’ai réécouté les concerts ? Non, je suis trop occupé...

R&F : Quelles sont vos périodes favorites du groupe ?

Bob Weir : Les relations entre nous évoluaient en permanence et pour moi, les bonnes années étaient presque immédiatem­ent suivies de mauvaises. Je n’ai pas de période favorite du coup, ça changeait constammen­t. C’est le propre de ce genre d’efforts de groupe dans le cadre d’un fonctionne­ment démocratiq­ue : les responsabi­lités changent, certains musiciens développen­t à un moment donné de nouvelles aptitudes qui modifient la dynamique générale, et tout cela représente à la fois des défis à surmonter et des gratificat­ions. R&F : Que vous inspirent le culte dont jouit le groupe et le fait que les bandes de Cornell soient conservées à la Bibliothèq­ue du Congrès ? Bob Weir : D’un côté, c’est agréable et édifiant, car on n’a jamais fait une musique qui était à la mode. Ça me laisse à penser que quelque chose dans notre approche était juste. De l’autre côté, on a fait ça il y a fort longtemps, et c’est ce qu’on fait aujourd’hui qui importe le plus à mes yeux.

R&F : Justement, comment est né Dead & Company ?

Bob Weir : J’ai rencontré John lors d’une émission télé qu’il animait (le Late, Late Show

sur CBS, en 2015), j’étais l’un des invités musicaux. On avait 20 minutes pour faire la balance et on a joué environ deux heures, jusqu’à ce qu’on nous coupe le son. On a estimé qu’on ne s’était pas tout dit et on s’est décidé à faire un groupe. J’aime le fait qu’il comprenne ce qu’on cherche ainsi que les langages musicaux avec lesquels nous avons grandi. Et il a vraiment du répondant quand on échange des idées sur scène. On doit essayer d’écrire des morceaux tous les deux à la fin de la tournée et voir ce que ça donne en studio.

La devinette de Jerry

R&F : Vous avez toujours le même plaisir à jouer les chansons du Dead ?

Bob Weir : Toute l’idée est de faire en sorte de conserver une fraîcheur. Ça a toujours été le cas, rien de nouveau ici. Le simple fait d’avoir de nouveaux musiciens — Oteil Burbridge à la basse et Jeff Chimenti aux claviers — apporte une nouveauté à certains éléments de cette musique. Mais notre approche n’a pas changé : on joue le thème, puis on emmène la chanson faire un tour dans les bois. R&F : Quelle anecdote voudriez-vous partager au sujet de Jerry Garcia ? Bob Weir : Je me souviens d’une devinette absurde qu’il m’a posée il y a plus de 50 ans, on jouait dans un groupe folk à l’époque ( Mother McCree’s Uptown Jug Champion’s). Sa question était la suivante : “What’s the difference between a duck ?” Et la réponse est : “One leg is both the same”. ★

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