Rock & Folk

THE VACCINES

Le groupe londonien revient à ce qui fit son succès en début de décennie : des refrains simples, à écouter en levant sa pinte.

- Basile Farkas

Justin Young : “J’étais en vacances en France, c’était formidable.

Je suis rentré à Londres hier soir... Pour revenir à Paris ce matin.”

Voilà qui pourrait être une parabole de la carrière des Vaccines. Un groupe arrivé, toutes guitares dehors, en 2011, au moment où tout le monde se fichait du rock, mais réussissai­t à cartonner. Avant que le chanteur, Justin Young, ait un problème aux cordes vocales. Cela a donné le brillant “Come Of Age” (2012), où le groupe redoublait de créativité pour pallier aux problèmes de voix. En 2015, grand ménage, le quartette se réinvente pour sortir un disque bidouillé et électroniq­ue avec Dave Fridmann, l’inégal “English Graffiti. Ce printemps, les malins Anglais reviennent avec un disque très porté sur les riffs de guitares, “Combat Sports”. Discussion avec Young et le guitariste Freddie Cowan, têtes pensantes d’une formation spécialist­e des allers et retours.

Des choses profondes

ROCK&FOLK : La dernière fois qu’on parlait avec vous, vous expliquiez à quel point le rock à guitares était mal en point. Et là, voici un album qui ne contient quasiment que des six-cordes.

Justin Young : Le dernier album, c’était nous en train de s’ouvrir au monde. Celui-là, c’est le retour à ce que nous sommes. Un groupe qui revient à ce qui est naturel pour lui, à ce qu’il connaît, ce qui l’excitait au début. C’est toujours important de contextual­iser les choses, après cinq ans passés à jouer nos deux premiers albums en tournée et à être un groupe de rock, nous avons eu envie de faire autre chose. Ça a donné “English Graffiti”. Et nous voilà de retour à ce qu’on connaît.

R&F : Qu’est-ce qui a changé dans le groupe ?

Justin Young : Pete, le batteur, est parti. Son remplaçant est français, un Lillois mais qui vit à Paris. Il y a aussi un nouveau claviérist­e, qui vit également à Paris. Nous sommes donc un groupe 40% parisien. Cet album, on a passé deux ans à bosser dessus, à chercher des idées, chez nous au sud de Londres. Puis nous sommes allés à Sheffield, chez Ross Orton, qui a produit le premier MIA, mais aussi The Fall ou le dernier Arctic Monkeys. Un type qui aime à la fois la dance et le rock. Grâce à lui, nous nous sommes posé des questions presque existentie­lles : où nous situons-nous ? Où est ma voix ? A quoi sert la guitare ? Des choses profondes...

R&F : “Combat Sports” sonne presque comme un deuxième album... Justin Young : Il y a de ça. Cela ne veut pas dire que le deuxième et le troisième albums ne sont pas bons, mais je vois l’idée. Nous avons failli arrêter après “English Graffiti”... Freddie Cowan : L’avantage d’un groupe de rock, c’est qu’il peut tâtonner, tenter des choses, rater des choses et se rattraper sur le disque suivant. R&F : D’où vient l’agressivit­é des nouvelles chansons ?

Justin Young : On voulait faire un disque power pop au départ, c’était notre obsession. L’idée était de sonner comme un groupe punk qui jouerait des morceaux de Tom Petty. Ça a finalement été un peu autre chose. L’écriture powerpop est souvent très proche de la country. Trois ou quatre accords, changement majeur/ mineur. C’est une formule inspirante.

Freddie Cowan : Les groupes power pop, les Nerves, Blondie, sont un peu trop en retenue pour moi. En ce qui me concerne, je voulais des guitares rappelant les Stooges de “Raw Power”. Quelque chose de brutal.

Le plafond de verre

R&F : Les Vaccines sont arrivés dans un creux de vague historique pour le rock... Justin Young : Si j’étais un gamin de 15 ans, je ferais de la musique sur mon ordinateur, dans ma chambre. La bonne musique vient essentiell­ement de là ces temps-ci. Ça coûte beaucoup trop cher d’acheter des guitares... Ceci posé, je pense que le rock ne mourra jamais. Il y aura toujours un appétit pour ça, les groupes, les concerts, l’énergie. C’est un esprit. Freddie Cowan : “Is This It” des Strokes est sorti il y a dix-sept ans... J’ai l’impression que la guitare, en ce moment, n’est pas tellement dans la lumière. Il y a de la guitare partout, dans tous les styles, mais les gens s’en fichent un peu. Je n’imagine pas un groupe arriver en 2020 et engendrer un phénomène comme les Rolling Stones à leurs débuts. Selon moi, aucun groupe à guitares ne va plus casser le plafond de verre. Mais il faut aussi relativise­r. Le rock a toujours été quelque chose de contre-culturel. Les Smiths vendaient un dixième de ce que vendait Dire Straits et c’est très bien ainsi.

Newspapers in French

Newspapers from France