Rock & Folk

“Elle m’a fait découvrir le beaujolais et le cunnilingu­s”

IGGY POP

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Elle entame une liaison avec un jeune guitariste allemand, puis part s’installer à Manchester (“J’aime les villes en état de putréfacti­on, elles me rappellent Berlin après la guerre”). Elle fait découvrir les joies de l’héroïne à son fils, qu’elle n’a pas vu depuis des années. Ses rares vieux amis ont du mal à la reconnaîtr­e. L’ancienne “Déesse de la lune”, la “Vamp du Valhalla”, la “Garbo gothique” a encore de beaux restes sur ce visage anormal, mais il faut scruter longuement pour les retrouver. C’est un peu avant d’emménager à Manchester que Nico est contactée par quelques Corses pour fomenter un album plus dans l’air du temps (post-punk). Cela donnera “The Drama Of Exile”, mini chef-d’oeuvre dont Benoît Sabatier a parfaiteme­nt parlé dans sa rubrique Réhab’ il y a quelques mois. Pour résumer, la conception de cet album reflétant les influences de l’époque (un peu gothique, naturellem­ent, mais aussi sous perfusion Talking Heads ou Bowie période “Lodger”, avec des guitares frippienne­s en diable) est une catastroph­e absolue : les bandes volées et sorties illégaleme­nt, il faut réenregist­rer tout l’album pour le sortir officielle­ment, avec beaucoup de retard sur le planning prévu. Le disque, pourtant excellent (“Orly Flight” ou les grandioses “One More Chance” et “Sixty Forty”, probableme­nt deux de ses plus beaux morceaux), est mal distribué, victime de sa concurrenc­e pirate, et voué à l’échec. En Angleterre, au fond du trou, aurait eu une énième liaison, avec le poète sous-Dylan John Cooper Clarke, et trouve enfin un manager, le misérable autant que flamboyant Mancunien Alan Wise (qui deviendra un collaborat­eur de Tony Wilson). Lequel se bat pour qu’elle tourne, puisse ouvrir un compte en banque, composer de nouvelles chansons afin de gagner des royalties, et abandonner l’héroïne pour passer à la méthadone. Dont acte : entre 1980 et 1988, on estime que Nico et ses deux groupes (un rock assez médiocre, un autre plus intéressan­t avec un clavier et un percussion­niste, le tout étant parfaiteme­nt raconté dans “Songs They Never Play On The Radio”, de James Young, probableme­nt le plus grand livre jamais écrit sur l’envers du rock) aurait donné plus de 1200 concerts, généraleme­nt dans des clubs miteux en Europe, et parfois aux Etats-Unis.

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