Beach House

“7” BELLAUNION/PIAS

Si Aragon affirmait que “letempsde rêverestbiencourt”, Beach House prend, soixante ans plus tard, le contrepied de l’assertion du poète. Le duo de Baltimore n’est, en effet, guère du genre à se presser pour sculpter ses chansons mélancoliques et hypnotiques, préférant se laisser porter là où la spontanéité l’entraîne dans une ambiance que certains qualifient de dreampop. Formé en 2005, flottant depuis dans un espace situé entre Cocteau Twins, Mazzy Star et Jesus And Mary Chain, le duo creuse surtout le même sillon depuis six albums, mais atteint de nouveaux sommets sur “7”. S’appuyant sur une écriture artisanale et un sentiment diffus de vérité, Victoria Legrand (la nièce du compositeur Michel Legrand) et Alex Scally se sont cette fois totalement laissés porter par leur musique, sans souci de savoir s’ils allaient pouvoir la reproduire sur scène. Beach House n’a pas confié les clés à un producteur mais s’est adjoint les services de Peter Kember, alias Sonic Boom. Chargé d’insuffler le maximum de luminosité aux chansons, l’ex-Spacemen 3 apporte son savoir-faire et projette le tout dans l’espace. Aérien et songeur, l’univers mélodramatique de Beach House ondule telle l’idéale bande originale d’un film imaginé, très haut, entre Georges Méliès et Stanley Kubrick. Autres symboles de sa régénération, le batteur James Barone qui accompagne le groupe en live joue sur toutes les chansons et Alan Moulder (QOTSA, Foo Fighters, A Perfect Circle, etc.) a mixé le tout. Déconseillé aux fans de Justin Bieber, “7” est un album lunaire sur lequel il faut accepter de se poser pour y explorer tous les recoins imaginaires et en savourer les infinies possibilités. ✪✪✪✪ VINCENT HANON