Roger Daltrey
POLYDOR/UNIVERSALMUSIC Depuis 1973, Roger Daltrey s’autorise des aventures solo, une liberté qui favorise la longévité du groupe qu’il mène avec Pete Townshend : malgré la mort prématurée des deux autres, les Who fonctionnent encore quand l’envie ou la nécessité se font sentir. Pour son nouveau disque, il rappelle Dave Eringa, déjà producteur de “Goin’ Back Home”, surprenante collaboration avec Wilko Johnson de Dr Feelgood (2014). Ici, les guitares sont aux mains de Sean Genockey et — pourquoi s’en priver ? — de Pete Townshend (dans sept morceaux) avec Mick Talbot (claviers), John Hogg (basse) et Jeremy Stacey (batterie). En dehors de trois créations, dont le beau “Always Heading Home”, Roger Daltrey fouille dans le répertoire blanc — “How Far” (Manassas), “Where Is A Man To Go” (Gail Davies puis Dusty Springfield), “I’ve Got Your Love” (Boz Scaggs), “Into In My Arms” (Nick Cave) — et, comme savaient si bien faire les Who à leurs débuts, dans celui de la soul américaine : “As Long As I Have You” (Garnet Mimms), “You Haven’t Done Nothin’” (philippique de Stevie Wonder contre Richard Nixon), “Out Of Sight, Out Of Mind” (Five Keys), “The Love You Save (May Be Your Own)” (Joe Tex). Si l’enthousiasme sonne intact, comme en 1964, de l’aveu de l’artiste, interpréter ces oeuvres à son âge prend une dimension nouvelle dans la mesure où il a réellement vécu les sentiments qui y sont exprimés. Placée en ouverture, agrémentée de choeurs et de cuivres, la chansontitre surgit avec une véhémence renversante, comme si Roger Daltrey voulait d’entrée montrer de quoi il est toujours capable. Un uppercut sonique qui envoie l’auditeur dans les cordes. JEAN-WILLIAM THOURY