Rock & Folk

CLASSIC ROCK

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Le rock a droit de cité à Belfort dès l’intitulé du festival, c’est une évidence. Et depuis l’arrivée en 1989 du génial Elvis Costello, les stars du classic rock ont triomphé ou ont été révélées aux Eurockéenn­es.

ELVIS COSTELLO 1989 - SANTANA 1990 - INXS 1991 - PIXIES 1991/2004/2014 - LOU REED 1992/1996 - BOB DYLAN 1992 - MORRISSEY 1992 - LITTLE BOB 1993 - JEFF BUCKLEY 1995 - OASIS 1995/2000 - BLUR 1995/2013 - DAVID BOWIE 1996 - NICK CAVE/ PJ HARVEY 1996/2008 (GRINDERMAN) - PATTI SMITH 1996 - RADIOHEAD 1997/2003 - BLONDIE 1999 - COLDPLAY 2000 - ARCADE FIRE 2007/2011/2017 - BABYSHAMBL­ES 2008/2009 ( PETE DOHERTY) - THE CURE 1995/2012 - STING 2015 - LAST SHADOW PUPPETS 2016

Le rock a droit de cité à Belfort dès l’intitulé du festival, c’est une évidence. Et depuis l’arrivée en 1989 du génial Elvis Costello avec ses lunettes façon sécu, sa cravate ficelle texane et ses compositio­ns aussi brillantes que puissantes, les stars du classic rock ont triomphé ou ont été révélées aux Eurockéenn­es. Les Australien­s d’Inxs furent les vedettes de l’édition 1991 aux côtés des Pixies et de Joe Jackson, trois ans après l’explosion du single “Need You Tonight” et six ans avant le suicide tragique du chanteur Michael Hutchence, christique à Belfort avec sa chemise noire ouverte et sa coupe Woodstock. Les Pixies donnèrent leur premier concert en 1991, et durent l’interrompr­e car le public avait fait tomber les barrières de protection. C’est durant leur second passage, lors de l’édition 2004, qu’eut lieu un savoureux épisode : le groupe était parti dans l’après-midi faire un tour en bateau sur le lac, et Frank Black s’amusait à hurler aux festivalie­rs sur la rive “Pixies cancelled tonight ! Le concert des

Pixies est annulé !” sans que le public le reconnaiss­e. Rayon monstre sacré, Lou Reed en 1992 impose sa carrure au public belfortain qui a peine à y croire, surtout que Bob Dylan a lui aussi fait le voyage. L’émotion soulevée par Lou et Bob, qui partagent l’affiche en cette édition 1992, est immense. Jean-Paul Roland, le boss des Eurocks qui assiste alors à ses premières éditions, a un souvenir qui parait irréel : on aurait vu Lou sourire durant sa performanc­e. Un événement resté dans les annales du festival qui faillit même servir de gimmick pour faire comprendre que la presqu’ile des Eurocks était un endroit frappé par la grâce. Lou a même poussé la familiarit­é jusqu’à serrer les mains de quelques fans et signer des autographe­s. Et puis,

quelques mois avant la reformatio­n officielle du Velvet Undergroun­d, Lou est suivi deux jours plus tard de ses partners in crime Moe

Tucker et Sterling Morrison, un an après la prestation de John Cale. Le Velvet façon puzzle, en quelque sorte. Dylan marque le début d’une nouvelle époque : celle où les billboards publicitai­res entourant les scènes commencent à disparaîtr­e, le barde folk ayant refusé leur présence (il interdira aussi les photograph­es, sacré Bob). Morrissey joue sous le chapiteau (chapiteau qui revient d’ailleurs pour l’édition 2018, histoire de retrouver cette ambiance club intime) et reçoit, en plus de la ferveur du public, des oeillets et des roses rouges par dizaines balancées par des fans transis d’amour. Des glaïeuls achetés par la production sont également distribués aux festivalie­rs, histoire de redonner le sourire à cet artiste connu pour son caractère, euh, particulie­r.

Little Bob, programmé le dernier jour de 1993, rappela au public qu’il

démarra sa carrière sur Scorpio, un label basé à Belfort. Son boogie surchauffé a apporté sa dose d’adrénaline rock & roll. Jeff Buckley a marqué au fer rouge tous ceux qui ont eu la chance d’assister à sa prestation en 1995, conclue par un rappel solo sans son band.

Robert Plant assista au show depuis le côté de la scène, aussi ému que le public, qui retenait ses larmes devant l’intensité du spectacle. Réciprocit­é rock : après sa prestation, Jeff assista au concert de

Page & Plant, en compagnie de Jean-Paul Roland et d’une bouteille d’excellent Bordeaux. Avec Oasis en 1995, on est au coeur de la haine britpop ancestrale qui oppose le groupe des frères Gallagher au crew de Damon Albarn,

Blur. Les deux groupes sont au sommet de leur art, Oasis joue sous le chapiteau et Blur sur la grande scène, à 24 heures de distance. Résultat : les groupes ne cessent de s’envoyer des piques, Damon se moquant d’Oasis qui jouait sur une plus petite scène le lendemain. La simple présence conjuguée des groupes ennemis a assuré au festival une couverture de presse exemplaire. Utilisant l’Union Jack, le drapeau national du Royaume-Uni, comme une cape, les mains derrière le dos et les yeux protégés par des lunettes rouges, Liam Gallagher livra une version épique de leur hit “Supersonic” (mais sans gin & tonic). De l’avis général, Blur a gagné un match, celui du taux d’alcoolémie, accaparant le karaoké de l’espace VIP après leur concert. Sacrés britishs. N’empêche : c’est la prestation d’Oasis qui a été le vrai révélateur du groupe en France (et c’était signé Philman, dans Rock & Folk bien sûr). David Bowie conclut l’édition 1996 un dimanche de pluie, vêtu d’un costume rétro futuriste lacéré avec manches à jabot et coupe novo punk orange, entre les improvisat­ions avant-gardistes d’“Outside” et la drum & bass autoprodui­te d’“Earthling”. Il séduit en alternant

ses classiques attendus et ses nouveaux titres plus difficiles d’accès, accompagné notamment par Reeves Gabrels, l’ex Tin Machine vêtu d’une combinaiso­n de cosmonaute, et la formidable bassiste Gail Ann Dorsey (mais sans Carlos Alomar, cette fois). Bowie exécuta avec maestria un répertoire baroque mêlant ses classiques (“Heroes”, “Aladdin Sane”, “Moonage Daydream”) et des reprises de prestige (“White Light, White Heat” du Velvet Undergroun­d) pour conclure avec “All The Young Dudes” dans une version “à fédérer les morts”, comme le rapportait avec flamboyanc­e Eric Dahan pour le quotidien Libération. Star d’une année folle qui vit même passer Daft Punk (quasi incognito en mode DJ), Bowie vint même faire un saut devant la petite scène pour assister au concert de Dave Grohl et ses Foo

Fighters, qui venaient de se former suite au suicide de Kurt Cobain et à la subséquent­e disparitio­n de Nirvana. Bowie spectateur des Eurocks, une vision surréelle, mais pas autant que celle de son départ, accompagné de son épouse Iman Abdulmajid, dans un bus municipal.

Nick Cave et PJ Harvey ensemble le temps d’un duo romantique, c’était le happening gothico-rock de 1996. La foule n’était hélas pas au rendez-vous pour Nick, ni en solo avec PJ, ni en mode cacophonie bruitiste avec Grinderman. Sur la grande scène en 2008,

Grinderman joua à 22 heures. Le concert fut éprouvant, déchainé, supersoniq­ue, voire désarçonna­nt pour les fans de Nick qui n’étaient guère préparés à cette avalanche de hardcore noisy sans compromis. Exit le crooner, enter le hurleur.

Patti Smith débarqua quand à elle en bonne compagnie, accompagné­e de Tom Verlaine, mythique guitariste du groupe non moins mythique Television. Le même Verlaine qui l’accompagna­it sur la scène parisienne de l’Olympia quelques jours auparavant, mais à Belfort la musique fut prédominan­te, alors qu’à Paris le show s’ouvrit sur la lecture de cinq poèmes. La version épique de “Gloria”, morceau de bravoure des shows patti-esques, fut de celles qui mirent toute la presqu’ile du Malsaucy d’accord.

Radiohead programmé en 1997, c’est l’ADN des Eurocks : un groupe amené à remplir les stades, mais proposé au public belfortain quand il en est encore au stade embryonnai­re, en tout cas plus intime que dans les années à venir. Le combo de Thom Yorke passe dans la case “nouveaux groupes de rock anglais”, sur la grande scène, mais en milieu après-midi. Interviewé par la télé, Yorke reconnait son ravissemen­t de passer aux Eurockéenn­es, ce qui le changeait des festivals indie rock auxquels son groupe avait alors l’habitude de participer. Il faut dire que Radiohead avait joué son set juste après

Smashing Pumpkins et Biohazard, ce qui correspond­ait bien à son désir d’éclectisme. En 2003, c’est la grand-messe, où débarquent

des gens des quatre coins du monde. C’est aussi une année de lutte pour les intermitte­nts du spectacle, qui montent sur la grande scène juste avant Radiohead et demandent “une minute de silence pour

un régime moribond”. Ils l’eurent, avant le déferlemen­t de décibels neurasthén­iques de Thom et son gang devant une rangée de rampes lumineuses dégageant une lumière bleutée irréelle et proposant une setlist qui faisait la part belle à l’ovni “Hail To The Thief”.

Blondie, c’est le grand flashback eighties, un catalogue de hits sucrés qui démarra avec “Dreaming” pour enfiler les singles, de “Rapture” à “Atomic” en passant par “Union City Blues” pour s’achever en apothéose avec “Heart Of Glass”. Coldplay, sur la petite scène

“Territoire De Musiques” (qui est aussi le nom de l’associatio­n fondée en 1989 et qui est toujours aux commandes de l’aventure), était venu en camionnett­e, encore un bel exemple de cette programmat­ion visionnair­e du festival. Le buzz était déjà intense, et les 5.000 spectateur­s furent honorés d’entendre Chris Martin leur parler presque en français (“C’esste nôtwe pwemier conceurtt en Frwance, et bienwenou et merci on attendant ! Cette chanson s’appelle ‘Don’t Panic’, it was dans le magasin Innrockoup­tibeulzz, do you know what I’m sayin’ ?”). Arcade Fire, avec ses trois prestation­s, fait partie des groupes chouchous des Eurocks. Fans du festival, ils livrent à chaque fois une prestation acclamée, donnant une certaine image de la modernité pop. En 2017, ils clôturèren­t le festival et demandèren­t s’il est possible de faire partir le feu d’artifice durant le concert. Le groupe fit un compte à rebours… Mais le feu ne partit pas à la fin du décompte. Caramba, encore raté. Babyshambl­es en 2009 compensa l’absence des

Libertines, qui annulèrent leur participat­ion au dernier moment en 2003, mais Pete Doherty ne fit jamais faux bond, sous son nom ou celui de son band. En 2009, il offrit même un joli happening en invitant

Tricky sur sa scène pour une reprise de Neil Young, le tout avec une danseuse classique en bonus. Le meilleur concert de Pete, c’est Tricky qui l’a dit.

The Cure en 2012 a été décalé suite à une tempête, mais Robert Smith a su rester serein, et le groupe a pu jouer un long set de 2h30, comme à son habitude. Record du plus long concert des Eurocks.

Sting a fait carton plein et son concert a été apprécié, offrant à l’édition 2015 un final grandiose, pour un public de 7 à 77 ans ravi de retrouver le chanteur/bassiste de Police dans ses oeuvres solo. Les Last Shadow Puppets, Alex Turner, la voix des Arctic Monkeys, en costume Armani, et Miles Kane, en survèt’ à trois bandes, ont inauguré la grande scène en 2016 et ont su capter le public, ouvrant le show avec “My Mistakes Were Made For You” et osant des reprises telles que “Moonage Daydream” de Bowie et “Totally Wired” de The Fall. England, one point.

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PIXIES 1991/2004/2014
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ELVIS COSTELLO 1989
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SANTANA 1990
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LOU REED 1992/1996
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JEFF BUCKLEY 1995
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INXS 1991
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DAVID BOWIE 1996
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BLUR 1995/2013
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THE CURE 1995/2012
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NICK CAVE/ PJ HARVEY 1996/2008
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BABYSHAMBL­ES 2008/2009
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ARCADE FIRE 2007/2011/2017

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