Bancal mais empli de panache
Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleures galettes microsillon du moment.
Rééditions Mano Negra “Patchanka”, “Puta’s Fever”, “King Of The Bongo”, “Casa Babylon”, “In The Hell Of Patchinko” Because
Fer de lance de la scène alternative des années 80, groupe culte qui mêlait punk, ska et musique latine, la Mano Negra a droit à une réédition de tous ses albums sur vinyle pour la première fois depuis leur sortie originale — avec les masters d’époque ! Les visuels sont magnifiques (avec notamment la pochette ouverte de “Puta’s Fever”), et le CD de l’album est inclus en prime. Si les tubes restent immortels (“Pas Assez De Toi”, “Mala Vida”), certains disques n’ont pas toujours bien vieilli, si bien que le meilleur témoignage du groupe demeure certainement l’album live “In The Hell Of Patchinko”, débordant d’énergie et de folie.
Johnny Hallyday “Shake The Hand Of A Fool” Bear Family
Johnny Hallyday, et si c’était les étrangers qui en parlaient le mieux ? Quand l’idole est morte, les Allemands de Bear Family ont décidé de lui rendre hommage en rééditant des sessions enregistrées en 1962 à Nashville avec la crème des musiciens locaux. Des morceaux très rock’n’roll, chantés avec enthousiasme et en anglais, publiés sur divers EP en France au fil des années, mais jamais réunis sur un même disque. L’objet possède un livret fabuleux qui détaille les séances avec un souci du détail incroyable et un magnifique texte de Martin Hawkins qui, pour les non-initiés, contextualise l’affaire et dresse un touchant portrait de l’artiste.
“Une Musique Qui A Perdu Son Propriétaire. Une Cassette Sans Info. Un Album Sans Nom.” Delodio
Tout est dans le titre : la musique contenue sur ce disque provient d’une cassette perdue au fond d’une caisse, achetée dans un vide-grenier. Ce qu’elle contient ? Des chanson électroniques composées sur un synthétiseur vintage (Korg Mono/Poly) au début des années 80. Malgré une longue enquête pour en retrouver l’auteur, le label Delodio s’est résolu à publier la cassette telle quelle. Riche idée, car le contenu, aussi naïf que mélodique propose des détours souvent inattendus et s’avère étonnamment addictif.
Gong “Gong Est Mort, Vive Gong” Tiger Bay
Quand Gong s’est reformé un soir de mai 1977 pour jouer à l’Hippodrome de Paris, le groupe actif était alors égaré en plein jazz-rock bavard (“Gazeuse !”). Le concert enregistré ce soir-là, porté par Daevid Allen et Steve Hillage, voyait les membres originaux du groupe reprendre la main sur l’âme psychédélique de Gong et livrer un best of des meilleurs albums du groupe (“Camembert Electrique” et la trilogie “Radio Gnome Invisible”). Réédité avec sa pochette magnifique, ce double album est une excellente porte d’entrée pour les néophytes de cette secte excentrique à la discographie tentaculaire.
Les Ramblers “Ramblin’ Back To The Grave” Dangerhouse Skylab
C’était il y a trente ans. Le rock des années 60 était revenu à la mode sous l’impulsion de la scène Paisley Underground et du revival garage orchestré par les Fuzztones, Chesterfield Kings et Lyres. Côté français, les Lyonnais des Ramblers avaient peu d’équivalent dans le registre fuzz & Farfisa. Leur unique album est aujourd’hui réédité par les bienfaiteurs de Dangerhouse Skylab avec une pochette inédite (plus belle que l’originale) et un code de téléchargement qui offre pas moins de 17 titres bonus (tirés de singles, enregistrements pour le deuxième album inachevés, prises de répétition et live).
Alan Vega “Deuce Avenue”, “Power On To Zero Hour”, “New Raceion”, “Dujan Prang”, “2007”, “Station” Digging Diamonds
Gros coup pour la label français Digging Diamonds qui publie pas moins de six albums du regretté Alan Vega, figure légendaire de la scène punk de New York, connu surtout pour avoir été la figure de proue de Suicide. La plupart de ces disques — sortis à l’origine en CD entre 1990 et 2007 — n’avaient jamais été publiés en vinyle. Digging Diamonds comble ce manque avec goût : les pochettes d’époque, particulièrement abominables, sont remplacées par des visuels sombres et une charte graphique sobre. Les disques eux-mêmes, où Vega joue accompagné de sa compagne Liz Lamere, sont inégaux mais quelques diamants noirs méritent un détour, en particulier “Deuce Avenue”, décharné, minimaliste, vagabond et “New Raceion”, speed jusqu’à la frénésie.
Nouveautés The Norvins “Live!” Ave The Sound !
Les Norvins sont morts, vivent les Norvins ! En guise d’adieu après plus d’une décennie à enchanter les esthètes du garage, les Norvins publient en tirage limité un album live enregistré au Petit Bain en fin d’année 2017. Le vinyle, transparent avec des volutes de fumée, est superbe. L’album, nerveux et brut, témoigne d’un groupe qui s’arrête au sommet de son art.
La Secte Du Futur “Wounded Princes” Third Coming
On avait perdu trace de La Secte Du Futur depuis la sortie de son précédent album “Greetings From Youth” en 2014. Après une longue attente sort enfin le troisième (et dernier ?) album du groupe, sur vinyle transparent. Volontiers garage et lo-fi à ses débuts, La Secte Du Futur compose désormais des morceaux plus aérés et portés par les mélodies (“First Men On The Moon”, superbe), traversés d’influences électroniques et new wave. Un disque étonnant, parfois bancal mais empli de panache.
The Scaners “The Scaners” Dirty Water/ Dangerhouse Skylab/ Casbah /Teenage Hate / Adranalin Fix
Il n’y a qu’à poser les yeux sur la pochette : la liste des labels qui coproduisent le premier album des Scaners est impressionnante et témoigne de l’intérêt que suscite cet excellent groupe lyonnais au sein de la scène punk française et internationale. Le premier album des Scaners, porté par une énergie indéfectible et des textes consacrés aux petits hommes verts est une dinguerie punk synthétique qui, dans ses meilleurs moments (“Abduction”, “The Dries”), n’a rien à envier à Le Prince Harry ou aux Ausmuteants (mètres-étalons d’un genre en plein renouveau).
45 tours Triptides “Can’t You See” “Heavy Cloud” Croque Macadam
Les Californiens de Triptides ont un gros problème : ils écrivent trop de bons morceaux. Alors que leur récent album “Visitors” n’a pas encore fini de tourner sur notre platine, le groupe propose deux singles : “Heavy Cloud”, qui contient deux titres que seule la version CD de “Visitors” propose, et surtout ce “Can’t You See” à la magnifique pochette hommage aux Byrds.
Les Lullies “Don’t Look Twice” Slovenly
Réputés pour leurs concerts échevelés, les fantasques Lullies du Nevada proposent sur leur deuxième 45 tours quatre déflagrations garage punk qui ne dépassent pas les deux minutes (mention spéciale à “Don Craine”, hommage au fondateur de The Downliners Sect qui plafonne à 1 minute et 6 secondes). Un EP sous speed absolument irrésistible.
Peter Zaremba “Le Comte Psychédélique” Foo Manchu
Francophile convaincu, Peter Zaremba s’offre sur son premier 45 tours solo une étonnante escapade de deux morceaux dans la langue de Jacques Dutronc. Accompagné d’un ex-Roadrunners (Florent Barbier), le chanteur des Fleshtones s’essaie au chant yéyé avec mordant et malice (“Le Tueur Du Dernier Etage”).