Rock & Folk

Sinéad O’Connor

- EMMANUELLE DEBAUSSART

“I DO NOT WANT WHAT I HAVEN’T GOT” ENSIGN

Son premier album, “The Lion And The Cobra”, avait attiré l’attention autant pour le ton que pour la personnali­té et le look de son auteur, jeune Irlandaise rasée à blanc en réponse à sa maison de disques qui trouvait sa précédente coupe de cheveux bien trop courte ! Son mauvais caractère présumé est ici dompté, à l’image de sa voix. Toujours aussi impression­nante mais plus subtile dans l’interpréta­tion. Moins hargneux, moins brut, raffiné, un album personnel dans les compositio­ns comme dans l’interpréta­tion puisque Sinéad se charge d’une bonne partie des instrument­s (guitare acoustique, claviers, percus...). Avec des complices bien choisis comme un ancien Smiths à la basse (Andy Rourke), Marco Pirroni à la guitare (Siouxsie, Adam & The Ants) et son mari d’alors, John Reynolds à la batterie. A 24 ans, Sinéad est heureuse, s’assume comme mère de famille, femme et chanteuse, même si le milieu lui pèse déjà. L’album s’ouvre sur le ton de la confidence, “Feel So Different”, dans un murmure, puis par petites phrases égrenées, lâchées sur un tapis de cordes classiques. Beaucoup de ballades et de choix acoustique­s sur ce disque et même un titre a capella, celui qui donne son titre à l’album. Sur l’autre versant de ses envies, plus à l’image de ce qu’elle dit écouter chez elle, “I Am Streched On Your Grave”, très dub, émaillé de petites touches electro minimalist­es et de psalmodies world, qu’aurait pu proposer Björk à la même époque. Une chanson traditionn­elle irlandaise en fait, mais qu’on n’identifie comme telle qu’avec l’arrivée à brûle-pourpoint d’un fiddle pur souche. Autre connexion irlandaise, “The Emperor’s New Clothes”, plus rock, avec des ambiances annonciatr­ices des Cranberrie­s (encore en train d’affûter leurs armes cette année-là), avec une voix capable du même genre de prouesses vocales que Dolores mais plus posée, jamais harpie. En coup de coeur : une belle ballade militante, à la guitare acoustique, “Black Boys On Mopeds”, dénonçant le racisme ambiant et les violences policières des années Thatcher. Mais le tube absolu, c’est une reprise inattendue. Une chanson de Prince, initialeme­nt écrite pour la Family et passée pratiqueme­nt inaperçue dans sa version soul : “Nothing Compares 2 U” restera dans les charts et les annales, contribuan­t à faire de cet album l’un des plus gros succès de l’an 1990.

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