Rock & Folk

Pet Shop Boys

- JEROME SOLIGNY

“BEHAVIOUR” PARLOPHONE

Tout commence par “Being Boring” et finit par une autre chanson. “Jealousy”, martiale, rythmée par une séquence glaciale qu’un piano bien droit et quelques râles de violoncell­e ne parviennen­t pas à faire dévier d’un pouce, jusqu’à l’apothéose cuivrée sous les harpes. Dans ce contexte propice à l’abandon total, Neil Tennant décrit les travers du défaut incriminé que les amants connaissen­t parfois mieux qu’eux-mêmes. C’est cette force et ce talent des Pet Shop Boys que “Behaviour” réussit à dépeindre. Ni plus, ni moins. Lorsqu’il paraît en octobre 1990, la paire gaie en est déjà à son quatrième album et sait que l’image donnée par une rafale de tubes vidéo-clippés à outrance n’est pas exactement la bonne. Mieux que des Smiths sur lesquels on peut danser, les Pet Shops Boys vont ratifier le décret griffonné par d’autres, de Kraftwerk (“The Model”) à OMD (“Enola Gay”) : l’habillage discoïde sied à tout et en particulie­r à l’émotion vive. Sculpté comme des préliminai­res amoureux, “Being Boring” exhibe en s’effeuillan­t d’elle-même la nudité lactée de tout le disque : nappes de synthé-cordes, clapotis de wah-wah joué par JJ Belle (l’un des seuls musiciens auxquels le duo fait régulièrem­ent appel), basse ondoyante, cocktail de batteries Roland (TR 707, 808, 909) et puis les accords, ces accords gagnants qui caressent la mélodie, envoûtante et définitive. Tennant parle là de fêtes où il ne s’ennuyait jamais, de la jeunesse qui s’échappe lorsqu’on la nargue, des regards décomposés et de la vie qui blêmit puis fait la morte. D’une rare véhémence affichée, “How Can You Expect To Be Taken Seriously ?” et son riff de guitare grotesque règlent leur compte aux classic

rockers donneurs de leçons. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : aux retardatai­res, à ceux que le futur étourdit, les PSB prouvent avec “Behaviour” que leur pop usinée et décadente, grave et décalée, est devenue la référence. “My October Symphony”, de l’avis de ceux qui savent, est la plus belle aubade à l’ex-URSS (“Dois-je revoir ma symphonie d’octobre ? ...Changer la dédicace, de révolution

en révélation”). “So Hard” et “Nervously”, servies sur grésil synthétiqu­e dance ou apaisé par Harold Faltermeye­r, traitent d’épanchemen­ts moches ou purs selon l’heure et la position.

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