Liz Phair
“EXILE IN GUYVILLE” MATADOR
Cet album lo-fi est une petite merveille partant d’un principe totalement nouveau : passerait-il si les filles modernes Que se se mettaient à enregistrer des disques où elles aborderaient le sujet des garçons avec leurs mots ? Des disques où on parlerait bite, couilles, éjac faciale, DPA, avec tout ce que cela suppose ? Concept d’autant plus fort que Liz Phair entend répondre aux Stones point par point en enregistrant un disque-réponse à “Exile On Main St”. Armée de sa Les Paul Junior, d’une voix chaude et de sa seule bonne volonté, Liz Phair allait se tailler une fantastique cote de popularité. Jamais sur disque une fille n’avait sonné comme un mec tout en gardant sa voix de fille. Troublant ? Très vite un mouvement américain tenta de faire monter Liz en neige sur le thème elle pourrait être notre réponse à PJ Harvey. Une chanson surtout, “Fuck And Run”, la plus franche histoire de réveil comateux jamais enregistrée mélange un riff électrique pointillé, un texte genre mon journal je te parle, avec une franchise totalement intense. Le rock féminin s’est trouvé sa Lou Reed : “Je veux un petit ami/ Le mec qui se battra pour moi.” La phrase suivante met l’accent sur les sentiments bubblegum qui président à toute union : “Je veux tout le vieux cinéma/ Des lettres d’amour et du soda.” Et d’un coup, Liz Phair replace la chanson dans le contexte : “Je le sens dans mes vieux os/ Je passerai ma vie toute seule.” Refrain : “Just fuck and run, fuck and run, fuck and run...” Sur le deuxième titre, “Help Me Mary” qui bénéficie d’une prise de son décente façon “Velvet 3” (rires), Liz Phair repousse les avances d’un voyou : “Il squatte ma maison/ Passe des disques et picole/ Laisse des trucs zarbes dans l’évier/ C’est mon copain, je le lui prouve/ J’aime quand il me sodomise/ Je peux continuer à regarder la télé.” Loin, très loin, définitivement devant Madonna et toute la meute, Liz emporte l’affaire sur le quinzième titre, extrêmement produit (dans le contexte) : “Johnny Sunshine”. Une fois encore, il serait vain de croire que cette fille hurle comme Courtney, crie ou braille. “Exile In Guyville” est un album guère plus agressif qu’un disque des Bangles, et Liz Phair, moins qu’une chanteuse, est cette rareté absolue : une raconteuse. Un disque qui fait rire, penser et ne parle que de ça ? Si quelqu’un en connaît d’autres...