“Saturday Night Fever”
Avant même d’y prêter l’oreille, l’auditeur potentiel de “Saturday Night Fever”, doit connaître les chiffres. Trente-six ans après la sortie du film, on estime qu’il s’est vendu plus de trente millions d’exemplaires de cette BO dont plus de la moitié des titres ont été des hits planétaires. C’est après avoir lu “Tribal Rites Of The New Saturday Night”, un article du journaliste anglais Nik Cohn à propos de la fièvre disco du milieu des années 70, que Robert Stigwood, ex-employé de Brian Epstein et mentor des Bee Gees, a l’idée d’un film sur le sujet qu’il projette de tourner dans une discothèque de Brooklyn. Requinqués par “Jive Talkin’ ”, un N° 1 américain décroché deux ans auparavant, les frères Gibb sautent sur l’occasion d’écrire les principales chansons de ce long métrage qui fera de l’acteur de TV John Travolta, une énorme star. Pas fou, Stigwood inclut “Jive Talkin’ ” dans la BO, histoire de prouver que ses poulains, sacrés compositeurs, sont aussi des précurseurs. Ainsi les B(rothers) G(ibb), que “Massachusetts” ou “New York Mining Disaster 1941” avaient révélés dans les années 60, signent, après un revirement musical spectaculaire, la moitié de ce double album (en vinyle) paru fin 1977. L’Europe où sévit alors le punk voit arriver le film de John Badham d’un sale oeil mais finit par succomber à son charme insidieux : loin d’être une bluette à la “Thank God It’s Friday”, “Saturday Night Fever” narre en images percutantes le destin tragique de Tony Manero qui n’oublie sa vie minable qu’en dansant. Pour guider ses pas, les Bee Gees enregistrent au Château d’Hérouville un chapelet de chansons magiques, “Stayin’ Alive”, “Night Fever”, “You Should Be Dancing”, “More Than A Woman”, également interprétée par le groupe Tavares, et “If I Can’t Have You” pour Yvonne Elliman. Grosse caisse sur tous les temps, charley ouverte, guitares funky, cordes aériennes et accords de piano Rhodes plaqués, la recette est presque identique à celle de Chic mais sonne différemment dès qu’à l’unisson ou en parfaite harmonie, le trio se met à chanter. L’ensemble atteint alors des sommets qui exaspèrent les uns et donnent le vertige aux autres. Kool And The Gang ou The Trammps (“Disco Inferno”) sont également conviés à cette fête dont le meilleur moment reste “How Deep Is Your Love” et sa reverb (de château) naturelle.