Rock & Folk

Oasis

“BE HERE NOW”

- JOHAN DALLA BARBA

Après l’immense succès de “(What’s The Story) Morning Glory ?” et deux dates historique­s devant 250 000 personnes à Knebworth au cours d’une tournée michaotiqu­e mi-légendaire (Liam refuse de chanter un MTV Unplugged parce qu’il a

“la gorgeirrit­ée” puis fume des clopes devant le concert ; Noel quitte le groupe puis revient ; les narines gratouille­nt beaucoup) Oasis est complèteme­nt coupé du monde réel. Peu importe, les Gallagher et leurs faire-valoir se doivent d’accélérer et d’entériner leur statut de plusgrand

groupede rockdu monde. Alors façon “Grande Bouffe”, le menu sera gargantues­que : des onze nouvelles chansons de “Be Here Now”, seules deux ne dépassent pas les cinq minutes. Et dès l’ouverture hypnotique et interminab­le qu’est “D’you Know What I Mean” on comprend que l’aîné s’est donné les moyens de ses ambitions : un message en morse, le son d’un avion qui décolle, la suite d’accords de “Wonderwall”, et vas-y frangin ! Plus splendide et désinvolte que jamais, Liam va donc rouler des mécaniques au micro pendant près d’une heure un quart sur un tapis instrument­al titanesque dont on ne sait exactement comment Owen Morris (producteur pour une dernière fois) a bien pu se dépatouill­er sans perdre la tête. Les mélodies sont toujours aussi limpides (“The Girl In The Dirty Shirt” très Kinks) mais chaque riff est quasi systématiq­uement converti en un mur de son, lui-même surplombé des harmonies de l’ainé ou d’arrangemen­ts orchestrau­x grandioses. Autrefois tancé pour avoir

plagié Lennon en intro de “Don’t Look Back in Anger”, Noel répond en grillant tous les feux rouges, empruntant sans honte au lexique classic rock, jusque dans les paroles, dont une partie cite littéralem­ent les titres des standards qui ont fait son éducation... Sur “All Around The World”, sommet d’emphase, ce sont les cuivres de “Penny Lane” qui couronnent une coda qui atteint les hauteurs de “Hey Jude”. Et pourquoi pas ? La compositio­n, datant en réalité des débuts du groupe, avait été mise de côté pour “lejour où on pourra se payerun

orchestre”. Tout Oasis est là, grossi et comprimé. Comme si la finesse (relative) des premiers disques était la conséquenc­e d’une impossibil­ité plutôt que le produit d’une pudeur ou d’un quelconque bon goût. La britpop en crèvera : overdose. Mais quelle fête grandiose ce fut…

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