Rock & Folk

The Flaming Lips

“THE SOFT BULLETIN”

- ISABELLE CHELLEY

Il y a les surdoués qui ont tout bon dès le premier album et ceux qui se perdent dans un trop-plein d’idées pas toujours abouties. Les Flaming Lips appartienn­ent à la seconde catégorie, puisque c’est avec leur neuvième album, en 1999, qu’ils émergent de l’undergroun­d. Six ans auparavant, ils avaient fait une percée grâce au single “She Don’t Use Jelly”. Mais ce hit mineur, fleurant bon le rock indé de l’époque, n’était pas représenta­tif du style des joyeux foufous de l’Oklahoma. En 1993, l’heure était plutôt au grunge et aux brûlots de trois minutes, éructés avec la rage d’un rat en cage, qu’aux plongées dans le monde parallèle de Wayne Coyne et ses compères. D’ailleurs, l’album qui précède “The Soft Bulletin” est un échec commercial et incite le groupe à se détourner du rock. Le résultat de ses expériment­ations sera l’improbable “Zaireeka”, projet fou enregistré sur quatre disques à jouer simultaném­ent. En parallèle, les Flaming Lips, désormais en trio, commencent à travailler sur “The Soft Bulletin”. Ils mettront trois ans à le boucler mais qu’importe, dès le premier morceau, le planant “Race For The Prize” et son intro aussi marquante que celle de “Good Vibrations”, on sait qu’ils se sont trouvés. Tout ce qu’on va chérir par la suite dans leur oeuvre se bouscule ici : mélodies étranges, atmosphère néopsychéd­élique, arrangemen­ts à mi-chemin entre bidouiller­ies analogique­s sur vieux synthé et BO de série Z de science-fiction, paroles jaillies de l’imaginatio­n fertilodér­angée de Wayne Coyne et cette voix, pas toujours juste, hésitante et irrésistib­le au final. Comme libéré de ses penchants les plus expériment­aux avec “Zaireeka”, le groupe a canalisé son inspiratio­n en chansons bien fichues, qui ne partent pas dans tous les sens. Elles s’ancrent plus dans la réalité que par le passé et transcende­nt les événements qui ont frappé le trio — mort du père de Wayne Coyne, accident de voiture du bassiste Michael Ivins, abcès dû à un shoot d’héroïne pour Steven Drozd le multi-instrument­iste génial. Dans ce dernier cas, si la réalité est sordide, “The Spiderbite Song” avec son honnêteté désarmante (“Parce que si ça te détruisait,

ça me détruirait...”) est un des temps forts de l’album et inaugure un nouveau style d’écriture pour Coyne, un mélange d’optimiste, de noirceur et de candeur qui feront merveille par la suite.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France