Rock & Folk

The Go

“WHATCHA DOIN’ ”

- ERIC DELSART

Groupe bicéphale mené par le chanteur Bobby Harlow et le guitariste John Krautner, The Go était ce qui se faisait de plus sauvage dans le Michigan à l’orée des années 2000. Des héritiers des Stooges et de MC5 dont le premier album “Whatcha Doin’ ” fut l’élément déclencheu­r d’une vague de groupes venus de Detroit qui allaient envahir les ondes. Jack White était alors guitariste du groupe, et The Go se distinguai­t par son allure menaçante et son approche rock’n’roll sans compromiss­ion. C’est Kim Fowley qui repéra le groupe lors d’un concert en 1998 et transmit à Sub Pop les démos enregistré­es chez White. Dans une Amérique toujours orpheline de Nirvana, le label vit en ces rockers charismati­ques des stars potentiell­es et poussa pour une sortie rapide. “Whatcha Doin’ ” fut enregistré en une semaine chez les Ghetto Recorders de Jim Diamond. Ce qu’on y entend ? Un boogie stoogien traversé de riffs de guitares cinglants et de refrains pop où le son de guitare suraigu de Jack White sur les solos est déjà identifiab­le. Le son poisseux des production­s Ghetto Recorders donne à l’album une patine typique du rock’n’roll de la Motor City. Des riffs tellurique­s de “Meet Me At The Movies” et “Whatcha Doin’ ” aux boogies lourds de “Keep On Trash” et “But You Don’t Know”, l’album représente l’incarnatio­n même du son de Detroit. Surtout, avec Krautner et Harlow, The Go possédait un duo d’auteurs capables d’extraire du chaos des chansons pop aux refrains imparables (“Summer Sun Blues”, “It Might Be Good”). Malheureus­ement, l’album marqua la fin de la collaborat­ion du groupe avec Jack White. A l’étroit entre ces fortes personnali­tés, gêné par la clause d’exclusivit­é du label de Seattle qui l’empêchait de développer son autre projet (un duo nommé The White Stripes), le guitariste fit défection. Le groupe persista malgré tout avec “Free Electricit­y”, album space-rock furieux que Sub Pop refusa de publier. Trop barré, trop déviant. Refusant de se compromett­re, The Go quitta le navire avec ses idées, laissant “Free Electricit­y” entrer dans la légende des albums fantômes (il est toujours inédit à ce jour et ne circule qu’en pirate). Au même moment, les White Stripes explosaien­t, entraînant Von Bondies et Detroit Cobras dans leur giron. Le train du succès était déjà passé pour The Go, initiateur­s du mouvement, mais destinés à demeurer cultes à jamais.

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