Rock & Folk

PJ Harvey

“STORIES FROM THE CITY, STORIES FROM THE SEA”

- ISABELLE CHELLEY

En 2000, la sortie du cinquième album de PJ Harvey a divisé fans et critiques. D’un côté, les nouveaux convertis, qui jusqu’ici l’aimaient à petites doses, vite dépassés par son côté abrasif et inaccessib­le, chantent les louanges de la nouvelle direction prise par l’Anglaise. De l’autre, les amoureux de la première heure, vénérant ses quatre premiers disques, l’accusent d’avoir cédé à la facilité, voire à la banalité. Et au milieu, Polly Jean qui admet dans une interview à Q avoir voulu cette fois la beauté absolue en réaction à ses précédents albums. On avait pressenti par moments cette envie d’arrondir les angles sur “Is This Desire ?” (1998) où jouaient déjà Rob Ellis et Mick Harvey qu’on retrouve ici pour un album réalisé en trio (Thom Yorke n’apparaît que sur trois titres, dont le duo “This Mess We’re In”). La formation est réduite, mais les deux Harvey et Ellis font partie de la race des multi-instrument­istes expériment­ateurs et offrent ici des chansons tout sauf minimalist­es. Sous le charme des grands espaces de New York où l’album a été en partie composé, PJ Harvey se lâche sur des morceaux plein d’ampleur, laisse s’exprimer ses racines rock, punk et blues et dégaine les guitares musclées — elle n’est jamais aussi excitante et punchy qu’avec une six-cordes en main. Passé l’urgent et dérangé “Big Exit” où Polly se confondrai­t presque avec Patti, à qui la critique l’a comparée dès ses débuts (et dont l’influence est très présente sur “Stories...”), on se laisse embarquer par le tourbillon de “Good Fortune”, on s’étonne devant la simplicité et la candeur du mélodieux “You Said Something”. Et on sourit de l’entendre rugir “Je n’arrive pas à croire que la vie soit si complexe/ Quand tout ce je veux c’est te voir te

déshabille­r” (“This Is Love”) qui confirme que l’heure est aux histoires d’amour moins ésotérique­s et tourmentée­s que par le passé. New York tient également le rôle de muse et PJ émaille ses chansons de références à la ville et de noms de lieux, mi-touriste émerveillé­e, mi- small town girl écrasée par ce qui l’entoure. “Stories From The City...” reste l’un de ses plus grands succès critique et commercial, combinant chansons quasi pop et d’autres plus ambitieuse­s (“Kamikaze”). Il lui vaudra de remporter le Mercury Prize, qu’elle reçoit, ironie du sort, le 11 septembre 2001.

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