Rock & Folk

The Strokes

“IS THIS IT”

- DANNY BOY

Eté 2001, c’est officiel : le rock est mort. Nickelback, Korn et Limp Bizkit ne font plus rire. La déprime est globale. Au mois d’août, Rock&Folk affiche en couverture : “The Strokes : Trop beau pour être vrai ?” La question reflète bien la stupéfacti­on de la rédaction à l’écoute du premier album des New-Yorkais. Même le titre de la galette laisse l’auditeur perplexe : “Is This It ?” Sommes-nous en train de rêver ? Tenons-nous entre nos mains un album enfin... parfait ? La pochette, elle, l’est. Une photo bondage classieuse noire et blanche, comme un uppercut. Tout comme les onze titres du disque. Le groupe refuse tout compromis. Intégrité est le mot d’ordre. Cet album sera le leur ou ne sera pas. Après un essai désastreux, ils larguent Gil Norton qui produisit les Pixies et se tournent vers Gordon Raphael, un producteur pas très convention­nel, un peu à la ramasse et adepte du pétard. Un homme simple qui leur ressemble. L’harmonie est parfaite. Ils s’enferment dans son studio Transporte­rraum dans une cave de l’avenue A dans l’East Village de Manhattan et travaillen­t dur, quinze heures par jour en résistant à toute ingérence extérieure. Les huiles de chez Sony s’affolent. Le chef-d’oeuvre est emballé en tout juste un mois. Grand disque de rock, il est concis et ne dure que 36 minutes et 28 secondes. Toutes précieuses. Cet album est tellement à contre-courant, tellement anti-commercial que son succès devient inévitable. Quelle ironie ! Le son est rustique. On parle de lo-fi, une manière polie de parler de production corrompue. C’est tout simplement un retour au rock basique. Pas de synthés, que du naturel : guitares (beaucoup), basse, batterie et un chanteur (Julian Casablanca­s) dont la fausse indifféren­ce fait toute la différence. Les influences sont manifestes (Velvet Undergroun­d, Television) mais cet album est tellement sincère, tellement contempora­in qu’on se fout du passé. Après “Is This It”, rien ne sera plus pareil. “Last Nite”, “Someday”, “Hard To Explain”, “New York City Cops”, véritables bandeson du New York du nouveau millénaire, ont changé le paysage rock’n’roll a l’échelle planétaire. Un peu partout, les kids, guitare à l’épaule et Converse aux pieds, foncent au garage. Tout là-haut, les dieux du rock sourient. Le fun est de retour à New York. Pourtant, dans moins d’un mois, deux avions kamikazes feront pleurer le monde...

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