Rock & Folk

Franz Ferdinand

“FRANZ FERDINAND”

- CHRISTOPHE BASTERRA

Dans le monde de la musique moderne, encore plus qu’ailleurs sans doute, l’histoire a tendance à bégayer. En effet, tous les vingt ou vingt-cinq ans, des adolescent­s à la curiosité un peu plus aiguisée que la moyenne se plaisent à (re)découvrir formations, courants, modes, dont l’importance fut plus ou moins prégnante. Au début du troisième millénaire, la Grande-Bretagne déroule ainsi le tapis rouge pour accueillir cinq gamins américains qui réserrecte­nt le rock, celui de l’école New York/ CBGB, avant de préparer sa riposte et de (trop) vite s’enticher de The Libertines et de découvrir, un beau matin, Franz Ferdinand, vrai faux groupe écossais — trois d’entre eux sont en fait nés en Angleterre — formé à Glasgow en 2001 autour d’une bouteille de vodka. Trois ans plus tard, en tout début d’année, le quatuor, mèche nouvelle vague au vent, s’apprête à sortir le premier album le plus attendu depuis le “Psychocand­y” de The Jesus And Mary Chain. Loin d’être les perdreaux de l’année — le leader Alex Kapranos est sur la brèche depuis les années 90 — ces étudiants des Beaux-Arts partagent une même obsession : faire danser les filles. Alors, pour mieux y parvenir , Kapranos, Nick McCarthy, le jeunot Bob Hardy et Paul Thomson piochent dans un héritage laissé en friche depuis le début des années 80 et dans le catalogue Postcard Records en particulie­r, microstruc­ture éphémère (onze références puis s’en va) mais déterminan­te dans l’histoire de la pop internatio­nale, dont les deux fers de lance, Josef K et Orange Juice, rêvaient de marier le funk lascif de Chic au rock vénéneux du Velvet Undergroun­d. Accompagné de ses deux parrains, le quatuor révise les règles postpunk (option Gang Of Four, Wire et The Fire Engines) et revisite les années 60 avant de signer des chansons montées sur ressorts. Sans jamais reprendre son souffle, il décline un rock tendu et nerveux (“Jacqueline”, “Cheating On You”, “Darts Of Pleasure”), prend un accent synthétiqu­e (“Auf Achse” ou “Come On Home”, deux des meilleurs morceaux de New Order non écrits par New Order) et signe, tels des acrobates mélodiques, un single abracadabr­ant taillé comme un classique, exercice de pop dadaïste à haute teneur euphorisan­te. Définitive­ment porté par “Take Me Out” et un premier album impeccable, le nom de Franz Ferdinand s’apprête à entrer une nouvelle fois dans l’histoire.

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