Rock & Folk

New York Dolls

“NEW YORK DOLLS” MERCURY

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En février 1994, les chercheurs américains étaient parvenus à isoler le virus rock’n’rollien. Voilà, ça y était, c’était... Nirvana. Deux mois plus tard, Cobain tirait sa révérence, brutalemen­t. Et les chercheurs de reprendre leurs études, décontenan­cés, énervés, effarés de la violence de réaction du virus. Les petites filles, elles, avaient compris. On n’isole

pas le virus du rock’n’roll. Jamais. Nulle part. Impossible. Tout ce qu’on sait, c’est que la chose surgit à l’improviste, jamais où on l’attend, empoigne une bande de gosses et, le temps que le business rameute avec ses gros sabots, voilà, c’est fini, foutu, foiré. Et c’est très bien ainsi. L’histoire des Dolls, c’est cela. On ne place pas ses sous à la caisse d’épargne, mec, on s’offre un délire. Celui des Dolls était notoiremen­t sexuel. Cheveux longs, moues de drag-queen, vibromasse­urs et rouge à lèvres. Les Dolls étaient venus pour épater le bourgeois. Sur leurs trois concerts à Paris, ils n’en finirent qu’un, en ratèrent un autre, furent attaqués par les babas fous de rage du Bataclan et interrompu­s en plein tournage télé.

Shame. On ne verra donc jamais Johnny Thunders déchiquete­r sur sa Dan Armstrong des riffs nerveux et fuzzy. On ne verra jamais Johansen faire le Jag’ mieux que Steven Tyler. On ne verra pas Sylvain massacrer sa Gretsch, ni Arthur (en tutu) masturber sa grosse Fender Bass. Et Jerry Gerald Nolan, le meilleur batteur de rock de New York (écouter ses roulements sur “Personalit­y Crisis” et sur “Vietnamese Baby”) ? On ne le verra pas non plus. Tout ce disque est un manifeste. Il prouve que le rock’n’roll resurgit toujours où on ne l’attendait vraiment pas. Ici c’est dans un bar à putes avec cinq pouffiasse­s, trois junkies et deux dealers pour tout public. Les Dolls avaient la classe, la touche magique. Ils étaient prêts à tout, même à

le faire avec Frankenste­in et Johansen de

demander : “Pourriez-vous le faire avec Frankenste­in ?” Eh bien, heu... David... chez les disquaires aussi, il fallait se castagner. Ces cinq mecs en gonzesses, forcément, fallait être pédé pour acheter ça... A la Fnac on échangeait des coups entre fans des Doobie Brothers et mordus des Dolls. On rentrait chez soi hilare, un oeil au beurre noir et on s’écoutait “Personalit­y Crisis”. Arrogant et obscène. Juste comme cela doit être. PHILIPPE MANOEUVRE

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