Rock & Folk

Kevin Coyne

“MARJORY RAZORBLADE” VIRGIN

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Petit homme aux cheveux bouclés, à la dégaine d’éternel étudiant, Kevin Coyne est un teigneux. Il éructe du blues, son blues, proche cousin, dans l’esprit, de gens aux registres aussi différents que Captain Beefheart, Arno, RL Burnside ou Jon Spencer. Dans sa première vie, il était étudiant en art, infirmier psychiatri­que, puis travailleu­r social. Maintenant il est musicien, il chante un blues panaché de folk-rock et de country après un séjour de deux ans au sein de Siren. “Case History” marque en 1972 son passage en solo et, en 1973, “Marjory Razorblade”, son arrivée chez Virgin. Ce double album débute par l’histoire de cette “Marjory Lame De Rasoir” chantée a cappella avec cette vigueur, cette hargne, cette force de persuasion qui lui sont propres. Ingrédient­s essentiels de la Coyne

touch, ils sont également les moteurs des 19 morceaux suivants, de “Marlene” à “Chicken Wing”. Cette voix, à la férocité nasillarde ou gutturale selon les circonstan­ces, propage des récits tour à tour touchants, satiriques, sarcastiqu­es, désespérés, pleins de compassion ou de mordante ironie. Des tranches de vie passées au scalpel. Le bluesman anglais Gordon Smith ( cf “Long Overdue” sur Blue Horizon en 1968) apporte sa science de la slide guitar sur presque tous les morceaux, qu’ils soient folk-rock (“Talking To No One”), blues (“I Want My Crown”, “Cheat Me”, “Chicken Wing”), rock (“Marlene”) ou rockabilly (“Lonesome Valley”), lents (“Old Soldier”) ou plus rapides (“Eastbourne Ladies”). Parfois Kevin Coyne n’a besoin que d’une guitare acoustique, la sienne ou celle de Dave Clague (“Jakie And Edna”, “Everybody Says”...). D’autres fois la violence de la satire l’emporte (“This Is Spain”, “Nasty”). Disque original, diamant brut, sans concession d’aucune sorte, “Marjory Razorblade” est bien sûr à ranger dans la catégorie des trésors cachés, mais ceux qui ont eu le plaisir de le découvrir deviennent vite des accros. De 1974 à 1976, Kevin Coyne se fait accompagne­r par un groupe impression­nant bâti autour de l’organiste Zoot Money et du guitariste Andy Summers (“Heartburn”, “In Living Black And White”). Au début des années 80, Kevin Coyne se fixera en Allemagne, pays où il continue d’enregistre­r régulièrem­ent, presque un par an, des disques, la plupart du temps excellents. Il décède à Nuremberg en décembre 2004. PHILIPPE THIEYRE

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