Rock & Folk

Robert Palmer

“SNEAKIN’ SALLY THROUGH THE ALLEY” ISLAND

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En 1974, après la dissolutio­n du groupe anglais Vinegar Joe dans lequel il partageait le devant de la scène avec la radieuse Elkie Brooks, on ne donne pas cher de l’avenir de Robert Palmer, batteur passé au micro. Gosse du Yorkshire élevé à Malte, Palmer a développé au cours de ses voyages d’enfance un goût avéré pour les rythmiques enjouées et sa voix, soul de naissance, montre enfin ce qu’elle a réellement dans le coffre durant l’enregistre­ment de ce premier album solo. Avec l’aide des Meters et Little Feat, la crème des funksters de l’époque, le petit Robert met “Sneaking Sally Through The Alley” en boîte avec la conviction de ceux qui savent que talent et bon goût bien conjugués suffisent à jeter les bases d’une carrière. L’organe chaud et gorgé de bonnes intentions, Palmer déambule dans un répertoire taillé sur mesure par Lowell George, Allen Toussaint et lui-même. Les couplets s’enchaînent, les refrains se laissent entonner mais c’est évidemment l’approche jam session des séances qui donne tout son caractère à l’album. Le medley d’ouverture, “Sailing Shoes”/ “Hey Julia”/ “Sneakin’ Sally Through The Alley”, recense les trois compositeu­rs et, sous des faux airs de débandade cool, s’impose comme le quart d’heure funk le plus truculent jamais enregistré par un musicien blanc. Palmer (en)chante, harmonise au pied levé, riposte à luimême et gémit des choeurs qui ruissellen­t comme les murs des bouges de Bourbon Street, un verre avant l’aube. “Get Outside”, saoulée au swing des requins blancs qui lui tournent autour l’aileron tendu, présente Robert Palmer en crooner immaculé, futur mateur de jambes soyeuses et déjà grand amateur de substances fortes. Le nez dans la prise cocaïnée, il graisse la patte de “Blackmail” et “How Much Fun”, chansons chahutées par un piano bastringue au-dessus duquel plane l’âme soupçonneu­se du Delta. “From A Whisper To A Scream” et “Through It All There’s You”, élaborées comme deux pièces montées groove, montent en puissance à chaque sillon : la basse ondule, le B3 bouillonne et la batterie picore les jambes. Pendu à sa propre voix de maître chanteur, Robert Palmer implore les cuivres et se retrouve au beau milieu d’une charge black &

white fantastiqu­e. Parfois jugé inégal, “Sneakin’ Sally Through The Alley” coule pourtant de source sûre et annonce un parcours sans faute long de cinq albums. JEROME SOLIGNY

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