Rock & Folk

LCD Soundsyste­m

“LCD SOUNDSYSTE­M”

- BENOIT SABATIER

Le plan était le suivant : après avoir émergée dans les années 80 à Chicago (house) et Detroit (techno), après avoir conquis les foules dans les nineties, après avoir contaminé la pop et le R&B, la musique électroniq­ue devait au XXIe siècle annihiler toute concurrenc­e. C’était sans compter sur : un, le rock, cette vieille carne, fait alors un retour fracassant avec Jay Reatard, The Strokes, The White Stripes et The Libertines ; deux, les leaders du marché électroniq­ue se prennent les pieds dans le tapis — Moby, The Chemical Brothers, Fatboy Slim, Armand Van Helden, aucun ne parvient dans les années 00 à se renouveler. Et voilà l’electro sauvée par un vieux joufflu issu du rock... En 1988, à 18 ans, James Murphy sort l’album “A Christenin­g” sous le nom Falling Man (du sous-Bauhaus). L’étudiant new-yorkais monte ensuite Pony (du sousPixies), puis Speedking (du sous-Steve Albini). 1997, Murphy a 27 ans, aucun de ses albums rock n’a marché, il végète comme ingénieur du son, et il voit enfin la Vierge, sa voie, son karma, sous l’effet combiné de : la musique de Daft Punk et l’absorption d’ecstas. Il fout ses guitares au clou et plonge dans les machines. Le premier single electro du gros nounours de 32 ans sort en 2002, signé sous le nom LCD Soundsyste­m. “Losing My Edge”. Une bombe instantané­e. Murphy renouvelle la musique électroniq­ue en lui insufflant son érudition krautrock, son amour post-punk. La house puisait dans la disco, la techno chez Jarre et Kraftwerk ; l’electro de LCD Soundsyste­m cite (les paroles de “Losing My Edge”, noir sur blanc) PiL, Can, The Normal, Suicide, Section 25, Captain Beefheart, The Modern Lovers, This Heat, Mars, The Germs, Human League, Monks, Joy Division, The Slits, The Swans, Soft Cell, The Sonics, Faust, Pere Ubu... Entre un hommage à son illuminati­on (“Daft Punk Is Playing At My House”) et un hymne pour dancefloor­s (“Tribulatio­ns”), sur son premier album (homonyme), le boss du label DFA ne fait pas que balancer du beat au kilomètre : il digère sa culture rock (Pink Floyd pour “Never As Tired As When I’m Waking Up”, Brian Eno pour “Great Release”) et la passe au filtre electro avec maestria. Pareil pour son album suivant, héritier du “Station To Station” de Bowie. Dissolutio­n après le troisième album : la trajectoir­e de The Flying Lizards appliquée avec classe à l’électroniq­ue.

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