Rock & Folk

BB Brunes

“BLONDE COMME MOI”

- JONATHAN WITT

Il existe ce phénomène assez particulie­r au sein du microcosme rock and roll hexagonal : lorsqu’une scène émerge, un unique groupe, comme élu par les cieux, remporte la timbale populaire. C’est ce qui arrive, clairement, en 2006 avec les BB Brunes. On se souvient évidemment de ce mouvement de jeunes gens, bêtement qualifiés de bébés rockers par les médias goguenards, avec les Naast, Plastiscin­es, Second Sex ou les Shades... En cette époque où des adolescent­s gainés de cuir viennent s’encanaille­r chaque vendredi soir au Gibus, les BB Brunes sont un peu les outsiders de l’affaire. Rusés, ils sautent dans le wagon, profitent de l’engouement naissant et font rapidement leur trou. Lorsqu’il paraît, leur premier album, “Blonde Comme Moi” écrase la concurrenc­e, avec pas moins de deux-cent mille exemplaire­s écoulés la première année. Pourquoi ? Deux raisons à cela. La première : un timing parfait, l’opus faisant suite aux longs formats des plus polémiques Naast et Plastiscin­es. La seconde : Adrien Gallo possède une voix pleine de morgue et une belle gueule qui collent parfaiteme­nt au propos. La troisième, et principale : la chose a été préparée de longue date en compagnie de l’ex-Costars Claude Sitruk. Conséquenc­e, les chansons sont solidement carénées, les musiciens bien rodés, la production vivifiante, économe sans être chiche, à la manière du second effort des Libertines qui a visiblemen­t servi de modèle ici (jusqu’à la chanson cachée acoustique façon “France”). Mais, surtout, les tubes sont là, irrésistib­les, charmeurs, bravaches. La fière “Le Gang” et “Dis-Moi”, bien sûr, avec ses choeurs sixties et son refrain contagieux. On apprécie également beaucoup la conquérant­e cavalcade “J’Ecoute Les Cramps” (qui fait penser aux Clash) ainsi que l’enivrante “Perdus Cette Nuit”, ornée d’un orgue d’une pertinence totale. Sans oublier les excellente­s “Houna” ou “Pas Comme Ça”. Il est évidemment possible de railler les textes d’Adrien, parfois naïfs et portés sur les clichés (filles, drogues, baston), mais le garçon montre ici une rare aptitude à faire sonner le français, un sens de la formule qui fait très souvent mouche. En définitive, reste aujourd’hui une capsule de nostalgie ravigotant­e, à l’énergie salvatrice et au désarmant premier degré, véritable polaroïd d’une certaine innocence fanée, d’un temps où l’insoucianc­e était reine.

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