Rock & Folk

MGMT

“ORACULAR SPECTACULA­R”

- BASILE FARKAS

Que reste-t-il aujourd’hui du premier album de MGMT ? Car l’énervement fut invraisemb­lable à l’époque. D’un coup, fin 2007, les journalist­es, la mode, les femmes, les hommes, tout le monde s’est pris à désirer le groupe et son single “Time To Pretend”. Superbe chanson pop à l’habillage electro un peu vulgaire et donc excitant. Les paroles étaient semblet-il celles de jeunes gens déjà désabusés. “Nous nous étoufferon­s dans notre propre vomi et ce sera la fin. Nous étions

condamnés à faire semblant.” Même message sur la pochette, fascinante. Lumière irréelle de petit matin, où les deux zozos posent avec un regard d’enfants perdus, accoutrés comme aux plus sombres heures de Bow Wow Wow. MGMT, nom ironique donc puisque contractio­n de management, agaçait d’emblée. Et réussissai­t en ce sens parfaiteme­nt son entrée. Il reste un album, produit par Dave Fridmann, qui contient de grandes choses. Les deux ont à peu près 25 ans et des idées grandioses. Après l’hymne désenchant­é précédemme­nt cité qui donc ouvre l’album, c’est l’enfilade de tubes. Des titres qu’on reconnaît aux premières notes encore aujourd’hui. Pêle-mêle, “Kids” qui repose sur la même formule futée que “Time To Pretend” (déluge électroniq­ue + mélodie rêveuse). Un morceau très Bowie (“Weekend Wars”) nappé de fins arpèges. Sous ses airs d’ados fluo, le duo, moins de 25 ans de moyenne d’âge alors, fait montre d’un talent assez écoeurant. Doué pour faire des chansons simples (“Pieces Of What”), excentriqu­es (“Electric Feel”), folk, psychédéli­ques... Tout n’est pas renversant et d’ailleurs la seconde moitié du disque accuse un petit coup de mou. Mais ne serait-ce que pour “The Youth”, MGMT vaudra toujours mieux que les suiveurs qu’il engendrera (Empire Of The Sun notamment). Sur la fin de cette chanson, les deux ont l’idée de descendre d’un demi-ton et non de monter comme toute la pop le fait depuis 60 ans. C’est l’extase, le vertigineu­x sommet du disque. Le groupe sortira deux albums par la suite. Le parfois fulgurant “Congratula­tions” (2010), sous-produit (et d’ailleurs aussi sous produits). Puis en 2013, un album homonyme assez épuisant où l’on a arrêté de chercher une chanson valable. Mais ne serait-ce que pour les quelques moments de grâce ici gravés, on attendra toujours un rebond créatif de la part de ces joyeux hédonistes.

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